Jean-Philippe Giroux – IJL – Réseau.Presse – Le Courrier de la Nouvelle-Écosse
Ayant travaillé depuis plusieurs années dans le milieu communautaire, Gabrielle Samson de l’Isle Madame croit que l’Acadie de la Nouvelle-Écosse s’en tire bien d’un point de vue institutionnel, mais qu’elle pourrait être plus axée sur la collaboration entre régions, qu’il faut plus de mouvement entre les communautés et sortir de ses silos, notamment lors de la planification d’événements.
Avec une meilleure collaboration entre les associations et organismes, les gens pourraient profiter des moments de réseautage pour tisser des liens entre les participants d’autres régions dans la province.
Il faut aussi plus de transparence et d’honnêteté de la part des institutions quant à l’état des régions acadiennes, d’après Gabrielle. « Les gens n’aiment pas trop dire ce qui va mal. Ils perdent beaucoup d’argent, etc. Mais, vraiment, dans ce qui va mal, c’est gratuit. »
Elle est d’avis qu’il faut parler de ce qui touche monsieur et madame Tout-le-Monde dans la vie de tous les jours, soit « de parler de l’insécurité linguistique, de comment les gens sont épuisés d’être dans le bénévolat, de vraiment juste vivre les vrais enjeux et de trouver des moyens de renforcer les régions, au lieu de juste mettre la surface de, “ah, ça va bien chez nous, tout va bien !” »
Elle aimerait aussi qu’on aborde d’autres enjeux comme la barrière linguistique en français entre petits-enfants et grands-parents, l’usage courant de l’anglais entre élèves dans les écoles acadiennes, etc.
Selon elle, il ne faut pas éviter les enjeux plus sensibles. « On va finir par perdre nos communautés, si on ne commence pas à discuter des vrais enjeux », avertit Gabrielle.
Convaincre les autres
La même réflexion devrait être effectuée au niveau communautaire, propose Gabrielle Samson. Elle constate que beaucoup de travail se fait en recherche et en documentation avec les personnes qui sont « déjà convaincues », mais moins avec les individus en région.
« Si l’Acadie de la Nouvelle-Écosse continue sur cette route, elle n’existera plus parce que les bénévoles vont s’épuiser, parce qu’il y’a jamais eu de moments de créer ces moments-là de grands rassemblements jeunesses […] ou de créer les moments ahas, des moments d’aspiration culturelle. »
Elle ajoute qu’il va falloir un retour éventuel des associations dans les régions où l’Acadie se vit. « Si cela veut dire une décentralisation de la Fédération acadienne, je crois que ça serait le meilleur choix », défend Gabrielle.
L’accent sur l’inclusion
L’artiste Sylvie Boulianne, originaire de la Baie Sainte-Marie, est d’avis que chaque génération se bat pour la même chose. Toutefois, sa génération fait face à une nouvelle réalité : une hausse du nombre de personnes dans la communauté qui n’est pas Acadien de naissance, soit des francophones d’autres régions du Canada ou d’autres pays. « Il faut que l’Acadie s’adapte à ça », lance-t-elle.
Il serait favorable également de créer d’autres initiatives pour rendre la culture acadienne plus consommable aux gens d’autres origines, explique Gabrielle Samson, soit une modernisation de la culture tout en préservant les moments clés pour commémorer le passé et l’histoire acadienne.
Et comment y parvenir ? En incluant plus de gens dans le mélange, selon Gabrielle.
Hors frontières
L’Acadie a toujours été en expansion, affirme Sylvie Boulianne, et que cette évolution prend de nouvelles formes aujourd’hui avec Internet, où de plus en plus de musiciens peuvent prendre leur place et se faire connaitre. « Grâce à la technologie et tout ça, tu sais, on est plus sur la map. »
Malgré l’intérêt envers l’art produit par les Acadiens, certaines barrières demeurent dans d’autres domaines. Robert d’Entremont est un comédien natif de Pubnico qui vit à Montréal. Lorsqu’il fait des auditions dans cette métropole, il lui arrive souvent de jouer le rôle d’un Acadien ou d’un personnage avec un accent anglophone en français.
Robert aimerait que l’industrie soit plus ouverte à la diversité linguistique, soit qu’un Acadien avec un accent comme le sien puisse jouer des rôles typiques par exemple de policiers ou d’infirmiers, sans que l’accent soit mis sur les origines où le parler du comédien.