le Mardi 18 février 2025
le Vendredi 16 février 2024 7:00 Éditorial

L’histoire des Noirs : on a tous un rôle à jouer

  PHOTO : Markus Spiske - Unsplash
PHOTO : Markus Spiske - Unsplash
La Nouvelle-Écosse souligne le Mois de l'histoire des Noirs depuis 1988. C’est en 1996 qu’il fut rebaptisé Mois du patrimoine africain. Chaque février, les Néo-Écossais en profitent pour s'éduquer sur les apports de la communauté noire, mais aussi sur les défis et obstacles auxquels les Noirs sont encore confrontés aujourd'hui. Et si on voulait en faire plus, par où devrait-on commencer ?
L’histoire des Noirs : on a tous un rôle à jouer
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Être un allié, ce n’est pas une identité. C’est une phrase qui revient souvent dans les cercles de justice sociale. C’est un travail humain et souvent invisible qui se développe tranquillement au fil du temps. Mais utiliser le mot allié comme étiquette pourrait être un peu gênant, du moins du point de vue des membres du groupe qu’on tente de soutenir, car on ne peut pas devenir une minorité visible et vivre ce qu’elle vit. 

Il est difficile pour moi de parler du racisme, car je n’ai aucune idée c’est quoi concrètement. Je ne l’ai jamais vécu, donc je ne l’ai jamais connu. Je peux lire un livre sur le racisme anti-noir, suivre un cours sur le colonialisme et le génocide ou écouter et répéter ce que les personnes racisées me disent, mais au final, ce n’est pas assez pour comprendre comment on se sent lorsqu’on est victime du racisme. 

Être un bon allié, c’est d’être conscient de ce qui se passe autour de nous et de ce qui a eu lieu, sans le nier ou le dédramatiser. C’est aussi d’accepter que notre enseignement de l’histoire noir ait été, dans la plupart des cas, partiel ou incomplet. À titre d’exemple, plusieurs ne sont pas au courant de la période esclavagiste du Canada, qui a duré près de 200 ans sur le territoire et dont nombre d’Autochtones et d’Afro-descendants ont été victimes. Il y a aussi plusieurs récits de Loyalistes noirs ayant marqué les Néo-Écossais qu’on ignore. 

La découverte du Centre du patrimoine loyaliste noir m’a permis de faire éclater une autre bulle. Je l’ai visité l’année dernière sur un coup de tête. Je pensais y rester brièvement, pour environ une demi-heure. J’y suis resté cinq heures pour passer à travers tous les dossiers, de la période précoloniale à l’histoire contemporaine. Il y avait un mélange de gratitude et d’inconfort. Le malaise ne provenait pas du matériel comme tel, mais du fait que je le découvrais à l’âge adulte, par choix. 

Le privilège, c’est un avantage particulier, tout simplement. On en a tous. Ce qui peut être difficile, c’est lorsque quelqu’un insinue que notre vie n’est pas difficile à cause de X ou Y, ce qui mène parfois à une attitude défensive. 

Mais en tant que personne blanche, je peux dire que je suis très privilégiée, puisque je n’ai pas fait face à des difficultés à cause de ma complexion. C’est aussi simple que ça. Et je pense que l’allyship doit commencer par ce constat. 

Il faut aussi plus d’initiatives afin de s’éduquer sur l’histoire du colonialisme et du racisme. Au Canada, nous avons des ateliers de couverture (Blanket Exercise), inspirés des méthodologies autochtones, pour se mettre à la place des Premières Nations, Métis et Inuit qui ont été victimes de la colonisation nord-américaine. On pourrait aussi s’inspirer de l’Allemagne, qui a une manière particulière d’enseigner l’Holocauste, afin de se familiariser avec l’histoire de l’esclavagisme et de ses conséquences. 

De toutes les méthodes, j’aime particulièrement l’écoute active et de voir les groupes mener la discussion. C’est un beau message, qui va au-delà du Mois du patrimoine africain : on est tous maîtres de soi et de notre histoire. Et nous pouvons l’appliquer ailleurs dans la société. 

En fin de compte, être allié, c’est assez facile ! Il faut tout simplement être à l’écoute, avec nos oreilles, nos yeux et notre cœur. 

Jean-Philippe Giroux 

Rédacteur en chef