Pourtant, en dépit de cette augmentation du nombre de francophones, d’une part, et la volonté du gouvernement de la Nouvelle-Écosse d’attirer plus d’immigrants francophones dans la province, d’autre part, la langue française est totalement absente d’un grand nombre de bureaux de services publics dans la province.
Même lorsque les petites affiches «Bonjour/Hello» et «Bonjour/français-english» sont visiblement placardées dans certains bureaux, il n’y a aucun agent pouvant s’exprimer en français aux clients francophones.
D’autres institutions comme des hôpitaux et des tribunaux ne font pas exception à cette règle. «I am sorry, i don’t speak french» est la phrase courante dans différentes réceptions de bureau en Nouvelle-Écosse. En effet, que peut apporter le Congrès mondial acadien à de meilleurs services en français à la population francophone de la Nouvelle-Écosse?
Par ailleurs, dans la section Impact pour la communauté du rapport final du CMA 2004, organisé en Nouvelle-Écosse, le comité a bel et bien évoqué la présence du français dans le paysage linguistique de cette province. «Parmi les projets innovateurs de la communauté, on compte le projet de signalisation bilingue (autoroutes et commerces) ainsi que le placement de plus de 250 bannières “Bienvenue en Clare” d’un bout de la communauté à l’autre», a-t-on lu dans ce rapport.
En plus de cet impact, c’est le 1er octobre 2004, dans la foulée de ce CMA, que le gouvernement de John Hamm, premier ministre de la Nouvelle-Écosse de 1999 à 2006, a déposé un projet de loi qui a non seulement reconnu l’Office des affaires acadiennes, mais qui a aussi été intégré à la Loi sur la fonction publique provinciale. Cette loi a été adoptée par la législature, le 14 octobre de la même année, et a reçu l’assentiment royal, le 18 octobre suivant.
À la lumière de ce qui précède, il est évident que le Congrès mondial acadien a un impact considérable sur la francophonie en Nouvelle-Écosse et, du même coup, peut améliorer les services en français dans l’administration publique.
D’ailleurs, dans une entrevue accordée récemment à Francopresse, Allister Surette, président du comité organisateur du CMA 2024, a dit que ce rassemblement est le plus grand événement de la francophonie. Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, ce sont en majorité des régions anglodominantes qui accueillent tous les cinq ans le plus grand événement de la francophonie.
Si l’on tient compte de l’histoire de la langue française en Amérique, elle devrait être plus présente en Nouvelle-Écosse. C’est en ce sens que le CMA peut créer des espaces de débats en vue d’encourager les ministères, les organismes et les sociétés d’État dans l’élaboration et l’adoption de programmes et de services en français adaptés réellement aux besoins de la population acadienne et francophone. Jusqu’ici, la Nouvelle-Écosse n’est pas le meilleur endroit pour vivre en tant que francophone unilingue.
On ne peut aucunement parler de l’Acadie sans faire référence à la langue française. À cet effet, la présence de cette langue uniquement dans le paysage linguistique de certaines régions est nécessaire, mais non suffisante pour sa préservation.
Il faudrait la complétude institutionnelle telle qu’elle a été décrite par le sociologue Raymond Breton en 1964, c’est-à-dire que les Acadien(ne)s et les francophones ne devraient pas être dans l’obligation de consulter des institutions de langue anglaise afin de combler leurs besoins dans les domaines de la santé, de l’éducation et du travail, entre autres.
En somme, le CMA est plus qu’un rassemblement. Cet événement devrait être aussi un moment de réflexion sur les enjeux sociaux auxquels les Acadien(ne)s et les francophones font face. Il va de soi que le paroxysme de la complétude institutionnelle dans les régions acadiennes devrait être sur le tapis lors du CMA.