Lafferière était en Haïti, son pays natal, en vue d’animer une conférence à des jeunes sur la littérature à Port-au-Prince, quand il a appris cette nouvelle. Auteur de 37 livres dans sa carrière, de 1985 à 2023, l’écrivain sexagénaire est une figure iconique de la littérature francophone.
Littératures francophone et française, quelle différence ?
Aussi étonnant que cela puisse paraitre, dans le monde francophone, la littérature fait l’objet d’une bicatégorisation. Ainsi, une distinction s’impose entre littérature francophone et littérature française, quoique les deux englobent toutes des écrits en une seule et même langue : le français.
La littérature française englobe l’ensemble des œuvres écrites par des auteurs de nationalité française ou de culture française. Généralement rédigées en français, elle comprend non seulement la littérature écrite en « français standard », mais dans d’autres variétés de la France telles que le basque, le breton…
Quant à la littérature francophone, elle englobe les œuvres écrites en langue française par des auteurs d’autres nationalités. En ce sens, les œuvres écrites en français en Belgique, au Canada, en Suisse, en Haïti et en Afrique francophone, pour ne citer que ces espaces francophones, font partie de la littérature francophone. En ce sens, certes Dany Laferrière écrit en français et est membre de l’Académie française, il fait partie des auteurs de la littérature francophone et non la littérature française.
Toutefois, il y a une certaine divergence dans ces appellations, comme a fait remarquer Christiane Ndiaye dans son ouvrage intitulé Introduction aux littératures francophones. Selon l’auteure, les institutions québécoises distinguent trois corpus afin de sortir du lot, à savoir la littérature française, la littérature francophone et la littérature québécoise.

Dany Laferrière
L’ambition littéraire de Laferrière
Dany Laferrière est reconnu comme un écrivain qui fait usage des titres incitatifs, voire commerciaux, qui, selon plus d’un, n’ont rien à voir au contenu du livre. C’est le cas de Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, son premier ouvrage en 1985, ou Cette grenade dans la main du jeune nègre est-elle une arme ou un fruit ? en 1993.
Dans la même veine, en 2008, l’auteur avait surpris le monde francophone quand il a publié Je suis un écrivain japonais. Dans ce titre, non seulement l’auteur a fait preuve d’une ambition commerciale, mais il a aussi montré son intention d’aller au-delà des territoires francophones.
Sous une forme allégorique, il a voulu montrer que si un Japonais peut le lire et le comprendre, alors tout le monde peut le lire et le comprendre. En un mot, il n’appartient pas au Québec, encore moins au monde francophone, mais à tout le monde. C’est alors son ambition littéraire.
Des prix honorifiques
Si le poste à l’Académie française est sans aucun doute l’apogée de la riche carrière de Dany Laferrière, il a toutefois reçu quelque 22 prix littéraires dans le monde francophone.
En outre, il a reçu des doctorats honoris causa dans différentes universités comme Pierre-et-Marie-Curie et Paris-Sorbonne en France, Middlebury College, aux États-Unis, ainsi qu’aux universités d’Ottawa, Simon Fraser et McGill au Canada.
Laferrière est aussi membre d’honneur de l’Académie nationale des sciences, belles lettres et arts de Bordeaux et de l’Académie de Nîmes. Il est aussi président d’honneur de la nouvelle Fondation pour la Langue française.
Le chapeau de journaliste
Outre le chapeau d’écrivain, Dany Laferrière fut aussi un journaliste de renom non seulement en Haïti, son pays d’origine, mais aussi au Canada, son pays adoptif.
Il débute sa carrière de journaliste à l’hebdomadaire Le Petit Samedi soir et à Radio Haïti Inter. Il a laissé Haïti à la suite de l’assassinat de son ami et collègue, le journaliste Gasner Raymond, le 1er juin 1976. Au cours de cette nuit tragique, il parcourt les rues de Port-au-Prince pour dire adieu à ses amis avant de prendre l’avion pour Montréal.
Cet événement lui inspire son roman Le Cri des oiseaux fous, paru en 2000. De 2002 à 2007, il rédige chaque dimanche une chronique dans le quotidien La Presse sur des sujets variés comme, entre autres, la littérature, la peinture, la poésie, le cinéma et surtout l’immigration.
En somme, Laferrière marque la francophonie, particulièrement la littérature francophone de façon inaltérable. Avec des titres comme écrivain, scénariste, journaliste, romancier, poète, réalisateur, conférencier, le natif de Port-au-Prince a plusieurs cordes à son arc.