le Mercredi 11 septembre 2024
le Jeudi 25 mai 2023 9:00 Rubrique - Le Carrefour des Francophones

Mieux comprendre la situation du français sur les territoires postcoloniaux – 1re partie : l’Afrique

Le drapeau de la France déchiré en lambeaux.  — PHOTO - Olivier Darbonville (Unsplash)
Le drapeau de la France déchiré en lambeaux.
PHOTO - Olivier Darbonville (Unsplash)
Au cours de son histoire, la France a été l’une des plus grandes nations colonisatrices, car depuis le début du 16e siècle, elle participe à la conquête du monde. Dans tous les continents habités, il y avait des colonies françaises. C’est la raison pour laquelle l’histoire reconnait la France comme le deuxième empire colonial, après le Royaume-Uni.
Mieux comprendre la situation du français sur les territoires postcoloniaux – 1re partie : l’Afrique
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Par colonisation, il faut entendre la conquête d’un territoire par une force étrangère à des fins politiques et surtout économiques. 

En tant que pays colonisateur, la France a imposé son éducation, la religion catholique et surtout sa langue. D’ailleurs, si la langue française est présente sur tous les continents habités, c’est bien en raison de la colonisation.

Selon les dernières données statistiques publiées en novembre dernier par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le français est non seulement la langue officielle de 32 États, mais aussi la 5e langue qui a le plus grand nombre de locuteurs dans le monde après l’anglais, le mandarin, l’hindi et l’espagnol. L’OIF a aussi précisé que la langue française est la seule, avec l’anglais, qui est parlée sur cinq continents. 

Inutile de dire que ces pays auxquels l’OIF fait référence sont majoritairement des anciennes colonies françaises. En fait, quelle est la situation du français sur les territoires postcoloniaux ? Quel rapport s’est développé entre ces pays et le français après la conquête de leur indépendance ? 

Cette chronique se veut une réponse à ses questions en ouvrant une fenêtre d’abord sur l’Afrique qui se divise en deux principales régions : le Maghreb et l’Afrique subsaharienne.  

D’entrée de jeu, si la langue française a réellement le statut officiel dans nombre de pays, elle connait presque toujours la cohabitation avec au moins une autre langue. D’ailleurs, il n’y a que la France et la Principauté de Monaco dont le français est la seule langue officielle. Après la France, la République démocratique du Congo (RDC) est le pays qui connait le plus grand nombre de francophones. Pourtant, la RDC compte plus de 400 langues et dialectes confondus. L’Afrique en général est connue comme étant une tour de Babel avec ses multitudes de langues. 

S’il y a une chose qui ne joue pas en faveur du français dans beaucoup de pays, c’est que cette langue est héritière de la colonisation. Cette situation se trouve surtout dans les pays qui ont acquis leur indépendance face à la France par la guerre. C’est le cas du Maghreb, en particulier de l’Algérie. Si ce pays est toujours considéré comme étant francophone, il ne fait pas partie de la Francophonie. 

La situation du français en Algérie et dans les autres pays maghrébins comme le Maroc et la Tunisie est complexe depuis leur indépendance. L’arabe a retrouvé son statut de langue nationale, officielle et de culture, au détriment du français. « À l’école, le français a perdu la place dominante qui était la sienne à l’époque coloniale, même s’il continue de bénéficier d’un statut de langue étrangère privilégiée dans l’enseignement », a écrit Josias Semujanga dans le livre Introduction aux littératures francophones.

Dans son article titré La francophonie en Algérie, paru en 2004, Gilbert Grandguillaume a fait savoir que « la langue française en Algérie est l’objet d’une forte ambivalence, qui présente des aspects sociaux, culturels, politiques et identitaires ». 

Si la Tunisie a organisé le Sommet de la Francophonie en 2022, la situation du français dans le Maghreb suscite de l’inquiétude. D’ailleurs, le 30 juillet dernier, le président de l’Algérie, Abdelmadjid Tebboune, a déclaré que l’anglais sera intégré dans l’enseignement dès l’école primaire, au même titre que le français. 

Si en Afrique subsaharienne la langue française a été aussi introduite par la colonisation française et belge, la situation de cette langue n’y est pas complexe comme elle l’est au Maghreb. D’ailleurs, des Africains noirs croient dur comme fer que le français est une langue de culture.  

Dans son texte titré Le français, langue de Culture, Léopold Sédar Senghor, l’un des fondateurs de la Francophonie, a fait savoir que beaucoup d’écrivains noirs parlent mieux le français que leurs langues maternelles. Il a précisé aussi que la richesse du vocabulaire français et la multiplicité des synonymes poussent un écrivain noir à utiliser le français. 

Cette particularité de la langue française n’existe pas, selon l’auteur, dans les langues négro-africaines. Dans Le français, langue de Culture, qui fait une plaidoirie à la langue française, Senghor précise que la syntaxe du français fait de lui une langue claire, précise et concise, charmant ses utilisateurs. 

En somme, la situation du français dans les territoires postcoloniaux du Maghreb n’est pas semblable à celle de l’Afrique subsaharienne. Ainsi, cette dernière est la région où le français a connu la plus grande progression au cours des dernières années. 

Entre 2010 et 2014, la proportion de francophones a augmenté de 15 % en Afrique subsaharienne. Selon l’OIF, à partir de 2050, plus de 85 % des francophones devraient se trouver en Afrique. 

Si la présente chronique s’intéresse à l’Afrique, sa seconde partie portera sur la situation du français dans les territoires postcoloniaux du reste du monde.