Jean-Philippe Giroux
IJL – Réseau.Presse – Le Courrier de la Nouvelle-Écosse
Alinea International, une société spécialisée dans le conseil de développement international a collaboré avec CLIMAtlantic en vue de réunir des leadeurs locaux et internationaux en matière de climat.
Les panels et les discussions qui ont suivi avaient pour but d’explorer des solutions innovantes aux enjeux climatiques dans des régions précises, mais aussi de manière plus large, à l’échelle mondiale.
Pas de «nouvelle normalité»
Ce qui est crucial, c’est de comprendre que l’adaptation au climat est un processus, et non un projet ou simplement un phénomène humain, précise le conférencier Gordon Smith.
«On n’est pas en mesure de traiter l’adaptation au changement climatique comme un projet pour lequel on peut se frotter les mains [et dire], “J’y suis allé, j’ai fait ça, c’est fini, on s’en va. On a résolu le problème”, et après d’être capable de s’en aller», déclare-t-il.
«Le changement climatique sera toujours présent», poursuit M. Smith, mais la différence aujourd’hui, c’est le rythme auquel les changements se produisent.
Sabine Dietz, directrice générale de CLIMAtlantic se spécialisant dans la gestion des impacts de la montée du niveau de la mer, a mis l’accent sur les enjeux locaux et régionaux lors du premier panel du forum.
«Le changement climatique n’est pas en train de disparaitre, il n’y a pas de solution aux impacts du changement climatique et on n’est pas dans une nouvelle normalité. On vit dans un monde en mutation et on doit le reconnaitre», dit-elle.
La région de l’Atlantique est, selon elle, particulièrement touchée par les effets du réchauffement climatique, à cause de la taille de son territoire et sa proximité à l’océan.
«Nous sommes très petits et notre voix n’est généralement pas entendue», commente-t-elle.
D’après la Fédération canadienne des municipalités, les gouvernements municipaux sont responsables de la gestion de 60 % des infrastructures publiques du pays.
Penser autrement
Il faut aussi un changement de mentalité, lance Sabine Dietz, lorsqu’on aborde le sujet de l’adaptation au climat. «Parce qu’on pense pouvoir résoudre le problème de l’impact, on fait des tonnes d’erreurs en cours de route, dans le domaine de l’adaptation, qui sont extrêmement couteuses, et je pense qu’on ne peut plus se le permettre.»
L’adaptation climatique, ajoute-t-elle, ne met pas l’accent non plus sur la résolution du problème, car on est conscient que la crise climatique est pour rester et que la situation change constamment. Bref, les choses sont faites, mais pas réglées.
L’alternative est de faire les choses différemment, pour éviter de multiplier les retombées négatives causées par les initiatives d’adaptation. Il faut des solutions, pas juste des approches.
Il faut également tirer des leçons de ses erreurs et poser les bonnes questions. «Le plus gros problème est qu’on ne reconnait même pas qu’on ne comprend pas ce qu’on fait et que nos approches de la gestion des impacts du changement climatique pourraient ou peuvent faire du mal», observe-t-elle.
Simron Singh, expert dans la recherche en matière de solutions durables pour les petites iles, explique que les peuples insulaires, les plus vulnérables aux changements climatiques, peuvent s’adapter en s’appropriant un système de pensée non linéaire, lorsqu’on parle du développement et de la croissance infrastructurelle.
Cette linéarité est de plus en plus normalisée dans certains états insulaires, qui misent sur la croissance et l’accumulation de ressources matérielles pour construire davantage, sauf qu’il y a toujours le risque d’atteindre un point de basculement et, éventuellement, un effondrement du système.
Ce qui est efficient n’est pas toujours efficace, fait-il comme distinction. Une société peut devenir de plus en plus efficace tout en devenant de plus en plus vulnérable, à long terme.
Selon Sabine Dietz, les territoires canadiens, notamment les provinces côtières, comme la Nouvelle-Écosse, peuvent apprendre beaucoup des iles et de leurs initiatives.
Elle insiste sur le fait que le secteur de l’adaptation au climat est assez nouveau, contrairement à la biologie ou la conservation, et n’est pas toujours très «sexy» pour monsieur et madame Tout-le-Monde. C’est beaucoup de discussions autour de la prévention, des questions relatives à la durabilité des projets, etc.
Ce n’est pas de tendance, comme les voitures électriques ou les panneaux solaires, mais «c’est une chose qu’on doit faire d’urgence», conclut-elle.