Cette attaque contre les jeunes LGBTQ+ survient seulement quelques mois après que le gouvernement Higgs ait tenté d’éliminer l’immersion française au Nouveau-Brunswick. Il ne s’agit pas là d’une coïncidence, mais au contraire de deux composantes d’une même offensive visant à imposer une idéologie ultra conservatrice, voire fasciste.
Qu’ont en commun ces deux situations ? Elles concernent toutes les deux les écoles, lieux où sont véhiculées les valeurs d’une société, et elles portent, entre autres choses, sur la langue. L’abolition ratée de l’immersion française avait pour but de limiter le nombre de personnes qui apprendraient le français, et donc d’augmenter la prévalence de l’anglais et couper des liens qui auraient pu être tissés entre une communauté marginalisée et la majorité.
L’attaque contre les jeunes LGBTQ+ cherche aussi à couper des liens en leur rendant l’école hostile et en limitant qui peut parler d’eux et d’elles ouvertement. Elle cherche à ossifier la langue, à la standardiser pour en faire un outil de répression à la place d’un instrument de libération : un scénario bien familier pour les Acadiens et Acadiennes.
C’est justement en tranchant les liens qui nous unissent que les gouvernements et mouvements conservateurs cherchent à venir à bout des groupes qui refusent de se conformer à leur idéologie. Les personnes francophones queers se voient déjà tirées vers l’anglais, à la fois à cause de son statut hégémonique au pays et dans le monde, et à cause du manque de ressources et de mots en français. Remédier à ce manque est essentiel pour la survie de la francophonie en Acadie.
Mais plus que des ressources et des mots, c’est une solidarité sans équivoque qu’il faut entre nos deux communautés. Un conservatisme violent, qui tend vers le fascisme, s’infiltre dans notre société à une vitesse effarante. Nous voyons déjà très clairement, dans les attaques contre les personnes trans et contre le droit à l’avortement (pensons à la fermeture de la clinique 554), que ce conservatisme impose des idées patriarcales et hétéronormatives, ainsi des rôles genrés oppressifs, tout en limitant l’autonomie corporelle.
Mais il est aussi anglophone : en mai 2022, par exemple, Pierre Poilievre, maintenant chef du Parti conservateur du Canada, clamait ceci : « I’m a believer in using simple Anglo-Saxon words ». C’est une impossibilité à la fois morale et pratique de faire une place à la francophonie dans cette idéologie. Les francophones de partout au pays ont une longue expérience de lutte pour le droit à l’éducation, et il est temps de prêter main-forte aux jeunes trans et non-binaires qui se battent, iels aussi, pour ce droit.
La justice et la libération ne s’accomplissent pas à moitié. On s’en sortira toutes et tous ensemble, ou bien pas du tout.
–Violette Drouin