Marine Ernoult – IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
«C’est hyper important de venir aux ECMA [East Coast Music Awards] pour faire la promotion de nos artistes devant des professionnels du monde entier», affirme Carol Doucet, directrice du label musical Le Grenier Musique.
Pendant quatre jours, la responsable de la maison de disque néo-brunswickoise n’a de cesse de réseauter. Elle en-haîne des dizaines et des dizaines de rencontres avec des directeurs et directrices de festivals et de salles de spectacle.
À la clé, des tournées potentielles pour les chanteurs qu’elle représente dans le reste du Canada, mais aussi en Europe et aux États-Unis.
Cent professionnels de l’industrie musicale, canadiens et étrangers, participent aux ECMA à Charlottetown. L’équipe du Festival interceltique de Lorient est notamment présente.
Les artistes donnent également des spectacles devant les professionnels, avec toujours le même objectif : convaincre de leur talent pour décrocher des dates de concert ultérieures.
Trois groupes francophones représentés par Le Grenier Musique se produisent ainsi dans le cadre des ECMA. Plywood Joe et Sirène et Matelot ont notamment l’opportunité de jouer devant des délégués étrangers.
Explosion du coût des tournées
«C’est une vraie chance, car ce n’est pas facile pour les francophones de la région, il y a peu de salles en Atlantique et le Québec n’est pas toujours facilement accessible», observe Carol Doucet.
«Notre but est de soutenir tous les artistes, de leur offrir la plus grande visibilité possible», poursuit Blanche Israël, directrice générale de l’Association de la Musique de la Côte Est, qui organise les ECMA.
La responsable tient particulièrement à développer les marchés francophones : «La musique de la côte est du Canada est surtout connue comme une musique celtique, de violoneux, nous voulons plus faire valoir sa diversité.»
Pour les artistes, les ECMA constituent «un rendez-vous incontournable», selon Carol Doucet, car «les tournées et les cachets de spectacles sont leur source de revenus numéro un, le nerf de la guerre.»
Depuis la fin de la pandémie, le coût des tournées a cependant augmenté de 35% à cause de la hausse des prix de l’essence, des hôtels et de la nourriture.
«C’est de plus en plus difficile de faire de l’argent avec ça, de vivre de son art», constate Blanche Israël.
La directrice des ECMA insiste à cet égard sur «le rôle crucial» des subventions publiques qui permettent de «stimuler la créativité» des artistes.
Au niveau fédéral, elle évoque entre autres les aides financières du Conseil des arts du Canada et de Musicaction.
Subventions publiques sous-utilisées
«Si les artistes restent dans une veine purement commerciale, face aux défis d’argent, ils manquent de capacité d’invention pour de grands projets, considère-t-elle. Ils s’en tiennent à ce qui est possible commercialement et se tirent une balle dans le pied.»
À ses yeux, les musiciens de la région atlantique n’utilisent pas assez les fonds publics à leur disposition.
«Ils se privent d’opportunités alors qu’il existe énormément de programmes», regrette Blanche Israël.
Consciente de la difficulté de naviguer entre la multitude de fonds existants, elle aimerait que l’Association de la Musique de la Côte Est soutienne davantage les artistes dans la recherche de subventions.
«Pour ceux qui gèrent tout seul leur carrière, sans équipe pour les aider, ça peut être un gros défi de comprendre le système, d’aller chercher le bon financement», abonde dans le même sens Carol Doucet.
Parmi les autres sources de revenus, la directrice du Grenier Musique évoque les droits d’auteur lorsque les chansons sont diffusées à la radio.
En revanche, face aux géants du streaming, les ventes d’albums, à l’exception des vinyles, constituent désormais une source d’argent négligeable.