
Dans un article paru le 12 octobre, Radio-Canada rapporte qu’environ 8 % de la population néo-écossaise est désormais en attente d’un médecin de famille, comparativement à 5 % il y a un an.
De plus, la province compte désormais 31 médecins âgés de 75 ans et plus. C’est 10 de plus qu’il y a trois ans.
Pierre Roisné, directeur général du Réseau Santé Nouvelle-Écosse, constate que le problème du vieillissement touche toute la population.
« Malheureusement, les gens deviennent de plus en plus âgés dans le Canada atlantique […] On estime qu’environ 36 à 40 % de la population active est âgée de 50 ans et plus. Ce n’est pas juste le personnel médical, mais c’est vraiment un phénomène de société en Atlantique », explique-t-il.
En effet, selon le Bulletin sur le marché du travail de Nouvelle-Écosse en septembre 2021, « [l]es travailleurs âgés (55 ans et plus)continuent de représenter une part croissante de la population active. Même s’il ne comprend qu’environ un quart de l’emploi global, ce groupe d’âge était responsable de près de la moitié de la croissance annuelle de l’emploi d’une année à l’autre et de presque les deux tiers de la croissance de la population active ».
Une situation qui s’empire en milieu rural
Selon Pierre Roisné, le vieillissement des médecins a des impacts particuliers pour la population francophone. En plus de composer avec une pénurie de médecins et de services en français, elle souffre aussi de la compétitivité entre le milieu urbain et le milieu rural.
« Avant la pandémie, la plupart des professionnels de la santé souhaitaient être sur Halifax. À cause des meilleures infrastructures hospitalières, de la proximité avec un aéroport international en cas de voyage et des espaces culturels beaucoup plus importants que dans d’autres villes, les centres urbains présentaient un attrait plus important pour les nouveaux diplômés », explique le directeur du Réseau Santé.
D’après lui, la pandémie a rendu les zones rurales plus attrayantes pour le personnel médical. Il existe toutefois une grande compétitivité entre celles-ci pour avoir accès au personnel disponible.
C’est également ce que constate Michel Nadel, étudiant en médecine à l’Université Dalhousie. Il note qu’en plus du manque flagrant de ressources en milieu rural, il est difficile pour les nouveaux médecins de changer leurs habitudes pour aller vivre dans ces localités.
« La plupart des étudiants en médecine viennent de milieux urbains comme Halifax ou les autres grandes villes. Seule une poignée d’étudiants en médecine à Dalhousie viennent d’un milieu rural […] Par ailleurs, les centres urbains offrent de meilleures possibilités de carrière à long terme, ce qui ne rend pas évidente la relocalisation », ajoute-t-il.
Plaidoyer pour une stratégie gouvernementale
Selon Pierre Roisné, la nouvelle génération a envie de s’impliquer dans la communauté, mais hésite à cause des conditions de travail qui ne sont pas favorables.
Du manque de financement des services de santé au manque de ressources en français, surtout en milieu rural, en passant par les quarts de travail intenses et prolongés par manque de personnel, la pandémie à montré les défis auxquels est confronté le personnel médical au quotidien.
Lors de son discours du Trône, le gouvernement de Tim Houston a annoncé qu’il concrétiserait ses promesses électorales en créant un plan pour améliorer les services de santé en Nouvelle-Écosse.
Ce plan devrait inclure plus d’investissements pour le recrutement et la rétention de médecins, ainsi que l’inclusion des communautés dans le processus de recrutement. Le gouvernement veut aussi faciliter la reconnaissance des diplômes étrangers en médecine, allonger les heures d’ouvertures des salles d’opération et mettre en place un plan de pension pour les médecins à temps plein.
Pour Pierre Roisné, le gouvernement devrait inclure une stratégie pour attirer et retenir les nouveaux diplômés en médecine.
« On peut penser à des programmes de mentorat ou de stage pour pouvoir associer les jeunes qui sortent des études à des établissements en milieu rural […] La rétention passe par la création de stratégies locales, l’investissement dans des infrastructures adaptées et une amélioration des conditions de vie en zone rurale », ajoute-t-il.
Michel Nader estime pour sa part qu’il est de la responsabilité des nouveaux diplômés d’analyser leurs options : « Je crois qu’on a une responsabilité de considérer l’option [de pratiquer la médecine en milieu rural] et de voir où les communautés ont besoin d’aide. On n’est pas juste là pour le travail à l’hôpital, nous avons aussi une responsabilité de servir nos communautés. »