Cette date est aussi connue comme la Journée de la marmotte, une tradition populaire au Canada et aux États-Unis. Elle découle de la superstition hollandaise qui a cours en Pennsylvanie et qui veut qu’en sortant de son terrier, si la marmotte aperçoit son ombrage par temps clair, elle retourne à sa tanière et l’hiver durera encore six semaines. Si par ailleurs la marmotte ne voit pas son ombrage à cause des nuages, le printemps arrivera plus tôt. Si la tradition demeure populaire en ces temps modernes, les études n’ont démontré aucune corrélation entre la marmotte qui voit son ombrage et l’arrivée hâtive du printemps. Ici en Nouvelle-Écosse, même si la plupart de la province connaissait du mauvais temps, la marmotte Shubenacadie Sam a vu son ombrage, de mauvaises nouvelles pour les gens qui souhaitaient un printemps hâtif. Mais sait-on jamais avec les phénomènes climatiques imprévisibles qu’on connaît de nos jours…
Alors que plusieurs autres personnes ne voyaient en cette date que le dimanche du Super Bowl (football américain), c’était aussi le jour de la Chandeleur chez la plupart des Acadiens de la région de Chéticamp. La Chandeleur qu’on appelle aussi la Fête de la lumière est une ancienne tradition encore célébrée dans plusieurs parties du monde. La cérémonie religieuse qui y est associée est connue comme une célébration des chandelles – la célébration de la lumière, d’où le nom de la Chandeleur. Elle est aussi connue régionalement comme la Journée de la crêpe. On sentait sans doute dans plusieurs résidences locales une agréable odeur de crêpes frites.
La Chandeleur était aussi la journée de prédilection où, dans diverses cultures, on prévoyait les conditions atmosphériques. Si le soleil produisait un ombrage le jour de la Chandeleur, l’hiver allait durer plus longtemps; s’il n’y avait pas d’ombrage, l’hiver allait finir peu de temps après. Cette pratique a mené au folklore entourant la Journée de la marmotte qui tombe le 2 février.
La coutume veut qu’on doit manger des crêpes à la Chandeleur dans certaines régions de l’Europe, comme en France. Chaque membre de la famille prépare une crêpe qu’il fait cuire en tenant une pièce de monnaie à la main, ce qui devait être un gage de prospérité et de santé jusqu’à la prochaine célébration de la Chandeleur. Une autre tradition était celle de retourner la crêpe par une secousse du poignet tout en tenant la poêle avec la main droite et la pièce de monnaie dans la main gauche. La crêpe ne devait ni tomber, ni coller au plafond, ni se briser en morceaux. Si l’on réussisait, le bonheur était assuré.
Le Mardi gras fait référence aux célébrations du Carnaval, commençant à la Fête chrétienne de l’Épiphanie (Fête des rois mages) et finissant la veille du mercredi des Cendres. Le Mardi gras constitue le dernier soir où on peut manger de la nourriture grasse et riche avant de jeûner pour le Carême.
D’abord une fête religieuse datant de l’époque des Romains, la Fête de la Chandeleur célèbre la présentation de Jésus et souligne la fin de la saison de Noël. La Chandeleur a lieu 40 jours après Noël, le 2 février, et cette fête est associée à plusieurs proverbes et superstitions. Le nom de Chandeleur découle du mot chandelle, puisqu’il s’agit d’une fête chrétienne impliquant beaucoup de lumière et la bénédiction des chandelles.
Une autre tradition religieuse reconnue au fil des ans a lieu à la Fête de la Saint-Blaise, célébrée le 3 février chaque année. Ce jour-là, les gens se font bénir la gorge. Au début du IVe siècle, saint Blaise était évêque en Arménie et il était connu pour ses pouvoirs miraculeux de guérison. On raconte qu’il aurait guéri un jeune garçon qui s’était étouffé avec une arête de poisson. Ce n’est qu’un exemple du genre d’incident ayant conduit saint Blaise à être considéré comme le saint patron des maux de gorge. Ces deux traditions ont été fusionnées en une grande fête.
Les ancêtres acadiens ont célébré la Chandeleur régulièrement. Il y avait plusieurs préparations à prévoir et une grande fébrilité entourait cette journée spéciale. Voici une anecdote que racontait feu Joseph (à Paulite) Delaney de Saint-Joseph-du-Moine en décrivant une Chandeleur particulière qui avait eu lieu en 1934 à la résidence de Marcellin (à Charlot) Doucet au Ruisseau-du-Lac. « Vous voyez, c’était un effort de la communauté, disait-il. La première chose à faire était de trouver quelqu’un qui nous accueillerait dans sa résidence. Leur salon et leur cuisine seraient utilisés pour un party. À l’époque, environ cinquante-cinq familles peuplaient la paroisse. Ce n’était pas toujours facile de trouver une maison capable d’accueillir une telle foule. Le dernier jour de janvier et le premier jour de février, les jeunes hommes se rassemblaient avec des traîneaux pour hâler le bois qui alimenterait le poêle, les bacs pour la viande et les contenants de farine, de sucre, de patates, de carottes, entre autres. Les hommes allaient de maison en maison. Le chef du groupe entrait en tenant une canne de la Chandeleur toute enrubannée. Les autres suivaient le chef avec les mains posées sur les épaules de l’homme devant eux en dansant la danse de l’Escaouette. Une fois la danse finie, les propriétaires de la maison offraient la nourriture qu’ils pouvaient à ces hommes. Ces derniers chantaient en retour : En vous remerciant, mes gens d’honneur, d’avoir fourni pour la Chandeleur; un jour Dieu vous l’rendra, Alléluia. »
Et Joseph Delaney de poursuivre son histoire. « Quand toute la nourriture était livrée à la maison hôtesse, les hommes allaient chercher les femmes du village pour préparer la nourriture pour le souper du lendemain. Le jour de la Chandeleur, les gens se rassemblaient vers 3 heures de l’après-midi. D’habitude, mon frère Arthur et moi jouions du violon jusqu’à l’heure du souper. Les gens allaient avoir tout un festin. Seuls les adultes étaient invités à la fête. Les temps étaient alors durs et c’était beau de voir autant de nourriture! Plus tard dans la soirée, les plus jeunes arrivaient. Il pouvait y avoir entre 75 et 100 personnes dans la maison à n’importe quel moment donné ».
« Vers 11 h 30, c’était le moment pour une autre pause. Tout le monde mangeait les sandwiches et les pâtisseries qui restaient du souper. Vers minuit, les plus âgés s’en retournaient chez eux pour quelques heures de sommeil avant de revenir tôt le lendemain matin. Les plus jeunes continuaient à faire la fête jusque vers 5 h 30 du matin. Pour le déjeuner à 6 h, ils mangeaient du maquereau salé et des patates. Il paraît que ceci avait très bon goût après la bière du parc à vache (une boisson maison) fabriquée avec de la mélasse, de la levure et de l’eau. Les femmes buvaient du vin de bleuets ou de salsepareille qui était très fort. Quelques personnes fabriquaient de l’alcool de contrebande pour l’occasion. »
« Après le déjeuner, on jouait du violon jusqu’au dîner quand les gens commençaient à rentrer chez eux. Les paroissiens devaient aller à l’église pour la bénédiction des gorges. C’était toute une célébration, une fête qui durait presque vingt-quatre heures. Les temps ont vraiment changé. Les hommes passaient le chapeau pour payer les musiciens. Cette année-là, ils avaient ramassé 14,40 $, soit 7,20 $ pour chaque violoneux. Imaginez! On ne verrait pas ça au jour d’aujourd’hui. »
« Pendant plusieurs années, la Chandeleur était célébrée sans trop de problèmes, mais quand l’alcool est devenu de plus en plus populaire, des batailles ont éclaté, au grand déplaisir du curé. Plus tard, la Chandeleur n’était plus célébrée dans les maisons, mais plutôt à la salle paroissiale de Saint-Joseph-du-Moine. Chaque famille apportait un panier de victuailles. Les paroissiens mangeaient et dansaient de 7 h du soir à 3 h du matin », a-t-il conclu.
Comme on l’a mentionné, la maison choisie pour fêter la Chandeleur devait avoir une grande cuisine et être assez grande pour accommoder tous ces gens. Voici une liste des maisons qui ont accueilli les gens au fil du temps. Au Cap LeMoine : Martin (à Narcisse) Doucet, Simon (à Charles) Deveaux et Arsène (à Amédée) AuCoin. Au Lac : Marcellin (à Charlot) Doucet. À Saint-Joseph-du-Moine : Paulite (à Antoine) AuCoin, Moïse (à Émilien) LeBlanc et Placide (à David) Chiasson. À Grand-Étang : William Poirier, William (à Arsène) Doucet, Joe (à Marcellin) Doucet, Charles (à Auguste) Deveau, Pierre (à Dominique) Doucet, Isidore Chiasson, Padé (à Dan) Delaney et John J. AuCoin. À La Vernière : Émilien (à Marcellin) Chiasson, Léo (à Alexis) Poirier et Athanase (à Patrick) AuCoin.
Les paroissiens n’ont jamais célébré la Chandeleur sans mon grand-père [dit l’auteure du texte Rosie AuCoin-Grace], Pat (à Joe à Dosité) AuCoin. D’habitude, il était choisi comme le chef et il chantait l’Escaouette. Les violoneux étaient souvent Joseph et Arthur (à Paulite) Delaney, Paul (à William) AuCoin, Joe (à Patrick) AuCoin et Peter (à Joe) Chiasson. Le lendemain des festivités, les gens se regroupaient pour nettoyer la maison.
Une autre anecdote intéressante circule au sujet de la Chandeleur chez Simon (à Charles) Deveaux du Cap LeMoine. Le chanteur/violoneux Robert Deveaux de Saint-Joseph-du-Moine raconte une histoire qu’il tient de son ami, Albert (à Simon) Deveaux. « À cette époque-là, il y avait un violoneux très connu, P’tit Placide Odo, qui vivait à La Rigouèche (près de l’entrée du Parc national des Hautes-Terres). La veille des célébrations, Simon partait pour aller ramasser le violoneux en traîneau. L’entente était qu’il le ramènerait chez lui après les célébrations. J’allais visiter Albert dès l’âge de treize ans. C’était tout un personnage! Il était très intelligent et un vrai petit génie en mathématiques, physique et chimie. Il était aussi très connaissant en géographie et en histoire. Albert démontrait toujours de l’intérêt pour ce que j’étudiais à l’école. Je me rappelle d’une fois vers 2006, je pense, où j’ai visité Albert. Nous avons joué du violon ensemble, célébrant probablement la dernière Chandeleur qui ait eu lieu dans l’ancienne maison de Simon (à Charles) Deveaux. Ce fut une soirée que je ne suis pas près d’oublier », relate Robert Deveaux.