le Mardi 3 octobre 2023
le Jeudi 26 janvier 2023 9:00 Non classé

Nouvelle-Écosse : les services en deux langues est une utopie

Une affiche à Access Nova-Scotia, à Yarmouth.  — PHOTO - Jean Junior Nazaire Joinville
Une affiche à Access Nova-Scotia, à Yarmouth.
PHOTO - Jean Junior Nazaire Joinville
Le lundi 16 janvier, je me suis rendu au bureau de l’immigration à Halifax pour régler quelques affaires me concernant. Dans la fenêtre qui donne accès à la réception, il est écrit sur une affiche « Bonjour, français / anglais ». Cela signifie clairement qu’on peut me recevoir en français ou en anglais à la réception. Aussi étonnant que cela puisse paraître, la secrétaire, qui avait l’air d’une personne venant de la Chine ou du Japon, ne pouvait même pas dire « bonjour » en français. Puisque je voulais m’exprimer en français, j’ai passé quelques minutes en attente avant que la secrétaire ait trouvé quelqu’un dans l’institution pouvant me recevoir en français.
Nouvelle-Écosse : les services en deux langues est une utopie
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Ce lundi 23 janvier, j’ai vécu la même chose au bureau de Access Nova Scotia, à Yarmouth. Il est écrit aussi sur une petite affiche « Bonjour, français / anglais ». Mais ces affiches sont placées juste pour la galerie, juste pour faire voir que les services offerts sont bilingues. Aucune des secrétaires à la réception ne peut s’exprimer en français. Certes, j’ai reçu des documents papier en français ce jour-là, mais lorsqu’il s’agit de répondre à mes questions, l’anglais était l’unique langue utilisée. Cependant, sur le site de cette institution, il est écrit : « Accès Nouvelle-Écosse s’est engagé à permettre aux Néo-Écossais de langue française d’avoir accès, dans leur langue, aux informations, aux programmes et aux services gouvernementaux. »

Cette situation est flagrante dans beaucoup d’institutions, selon ce que quelques résidents en Nouvelle-Écosse m’ont dit. Le service en français dans cette province reste un grand défi dans les institutions gouvernementales. 

Depuis environ 20 ans, la Nouvelle-Écosse adopte la Loi sur les services en français. C’est une loi qui vise à favoriser le développement continu de la communauté francophone et acadienne de la province. Jusqu’à maintenant, cette loi n’est pas appliquée dans toutes les institutions, car le français est marginalisé au profit de l’anglais. Autrement dit, c’est une loi qui est en vigueur seulement dans les régions où il y a une concentration d’Acadiens.

Un client ou tout autre individu qui a besoin d’un service et qui ne maîtrise pas la langue dans laquelle il peut trouver ce service peut avoir un sentiment d’insécurité linguistique. Notamment, le terme d’« insécurité linguistique » a été introduit dans le monde sociolinguistique au cours des années 1960 par William Labov. Ce dernier est considéré comme l’un des fondateurs de la sociolinguistique moderne. L’insécurité linguistique est un manque de confiance ressenti quand on s’exprime. 

En Nouvelle-Écosse, des individus francophones se trouvent souvent dans cette situation quand ils se rendent dans un bureau où ils ont besoin d’un service. Ce sentiment se manifeste soit par leur manière de parler l’anglais qu’ils jugent mauvaise, soit par leur incapacité totale de s’exprimer dans cette langue. 

Cette situation met le francophone dans une situation d’infériorité par rapport à l’anglophone. Sur le plan hiérarchique, sa langue parait totalement inférieure par rapport à l’anglais. Selon des experts, une personne qui a ce sentiment peut avoir des réactions négatives en raison de la stigmatisation dont il fait l’objet. 

Il est temps de donner des services réellement en deux langues. Il est temps de laisser la phase utopique derrière nous et de rendre effectif le service en deux langues dans la province. Ce projet de services en deux langues dans cette province est réalisable dans la mesure où il y a de la bonne volonté auprès des autorités concernées.