J’invite quiconque lira ces lignes à prendre un moment pour se familiariser avec la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Fondée sur la proclamation française de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, elle fut proclamée à Paris par l’Assemblée générale des Nations Unies, le 10 décembre 1948. Trente articles énonçant, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, les libertés fondamentales et les droits de la personne universellement reconnus, ces mêmes droits qui se trouvent violés jour après jour partout dans le monde, droits bafoués ici même au sein de nos communautés.
Pour des raisons de confidentialité, un certain temps s’est écoulé depuis la rédaction de cette lettre. Un temps qui s’égrène sans relâche, un temps pourtant suspendu pour quelqu’un de notre entourage à ce moment précis : un nouveau cas de violence conjugale s’est fait connaître dans notre quartier, un quartier séduisant en plein cœur de Dartmouth, peuplé de chants d’oiseaux et de rires d’enfants en chemin vers le lac.
Trois victimes déclarées que nous connaissons personnellement, deux de ces cas étant survenus au cours des derniers mois, l’un d’entre eux dans les dernières semaines.
Il est désormais évident que certains de nos voisins et amis vivent au cœur d’une relation conjugale abusive, que nous en soyons conscients ou non.
Qu’une chose soit bien claire, la façon dont s’organise notre vie de couple et la dynamique de notre ménage ne regarde que nous, ce sont nos affaires, notre intimité. Chacun d’entre nous orchestre sa vie familiale selon des concepts largement influençables définis par des facteurs subjectifs tels que la génération à laquelle nous appartenons, nos valeurs, nos expériences passées, notre éducation, notre bagage culturel, nos cercles sociaux et plus encore.
La façon dont nous décidons de répartir les corvées quotidiennes, nos pratiques financières et sociales et même la simple question du sexe dépend entièrement de ce que nous décidons mutuellement en tant que couple, et ce qui peut paraître répréhensible pour certains mariages peut être tout à fait acceptable pour d’autres.
Mais pour ce qui est de la violence conjugale, ce n’est tout simplement jamais admissible.
Cela ne s’est peut-être produit qu’une fois, mais c’est une fois de trop et la porte est désormais ouverte pour que ça se reproduise. Que ce soit un acte isolé, que ce soit arrivé suite à un abus de substance ou dans des circonstances exceptionnelles, qu’elle qu’en soit la raison, la violence domestique ne peut et ne doit pas être tolérée.
Ces trois victimes de violence conjugale comptent parmi nos voisins, et pourtant, nous n’avions rien suspecté.
Entretenant divers degrés d’amitié avec chacune d’entre elles, un barbecue partagé dans le jardin pendant les beaux jours ou bien juste une petite causette en allant chercher le courrier, on jasait des enfants, des chiens, de la météo…
Mais pour ce qui est de connaître la faille émotionnelle du couple une fois les portes fermées, nous n’en savions rien. Et nous n’en aurions jamais rien su si la situation n’avait pris une tournure drastique, dévoilant au grand jour une réalité jusqu’alors nichée dans l’ombre.
Nous devons savoir. Quelqu’un doit savoir.
Si vous vous trouvez au cœur d’une relation abusive, parlez pendant qu’il en est encore temps. Si nous ne savons pas que vous avez des problèmes, nous ne pouvons pas vous aider. Si nous ne savons pas que vous êtes menacés, nous ne pouvons pas vous sauver.
Si vous êtes une tierce personne et que vous soupçonnez quelque chose, alors engagez la conversation avant que la situation ne dégénère. Un échange ouvert et amical, il n’y a pas de recette idéale pour aborder la question. Le sujet est cru, l’entretien le sera. Mais au risque d’essuyer une rebuffade, donnez-vous cette chance d’agir quand il en est encore temps plutôt que de nourrir des remords jusqu’à la fin de vos jours.
La violence conjugale a toujours existé et existera toujours, une triste réalité qui doit être surmontée.
Les enquêtes publiques sur une tragédie locale ayant touché notre nation au grand complet alimentent notre actualité, des rapports factuels estompant le facteur humain.
Il n’y a pas si longtemps, une vague médiatique a déferlé sur nos régions alors qu’une nouvelle victime exhalait son dernier souffle au creux des paumes de son conjoint. Des campagnes se sont organisées pour toucher la population, nos écoles se sont ralliées à la cause avec force récoltes de fonds et programmes de sensibilisation pour condamner ces actes et soutenir nos refuges. Aujourd’hui, la poussière est retombée et nous avons tourné la page.
Que s’est-il donc passé ? Notre jeunesse aurait-elle récolté assez d’argent et produits de première nécessité pour résoudre le problème une bonne fois pour toutes ? Non. Le monde continue simplement de tourner, à la poursuite d’un autre conflit à mettre en lumière, ainsi va la vie. Mais le problème persiste. Il faut faire quelque chose.
Une relation abusive est sur le point de dérailler, il faut vous en échapper au plus tôt avant qu’il ne soit trop tard.
Si vous hésitez parce que les gens vont médire, et bien oui, les gens médiront. Qu’elles se délient donc ces langues acérées et qu’elles servent leur communauté, enfin.
Les gens parlent, critiquent, commentent, c’est la nature humaine. Les gens critiquent la nuisance des bruits urbains tout en vantant la beauté des feux d’artifice commémoratifs. Puis ils passent à autre chose.
Les gens soulignent les dangers des produits paysagers sur la santé publique, mais dénigrent les jardins laissés au naturel. Puis ils passent à autre chose.
Les gens condamnent la rage au volant dans les zones résidentielles et dénoncent tout autant les mesures de modération de la circulation mises en place. Puis ils passent à autre chose.
Les gens parleront toujours, peu importe la raison, et ils continueront de passer à autre chose.
Et c’est exactement ce que vous devez faire : parler et passer à autre chose.
Allez chercher de l’aide sur les sites de soutien, disponible ici : https://www.nsdomesticviolence.ca/ ; trouvez plus d’informations sur les programmes provinciaux ici : https://novascotia.ca/just/victim_Services/family_violence.asp.
Ces ressources ont les outils adéquats pour vous accompagner tout au long de votre parcours, et la structure nécessaire pour héberger vous et votre famille.
Si vous êtes inquiets de devoir passer la nuit dans un refuge au milieu d’individus en détresse, de vous coucher ce soir dans un lit fraîchement préparé sous le toit d’inconnus, je peux vous assurer que ce sera bien mieux que de rassembler les morceaux de votre âme dévastée éparpillés sur le plancher de la cuisine.
Si vous n’êtes pas sûrs de prendre la bonne décision, avec tant de questions en tête que vous ne pouvez plus penser clairement, alors arrêtez tout et reprenez à zéro.
Chacun d’entre nous passe par ces moments d’angoisse alors qu’on se réveille aux petites heures du matin, des milliers de doutes triviaux qui nous envahissent. « Que va-t-on faire si je perds mon emploi ? » « Comment encourager mon adolescente à avoir des relations saines avec ses camarades ? » « Que va-t-il me rester si je suis atteint d’Alzheimer ? »
Ces questions existentielles s’éclairciront d’elles-mêmes. Une fois l’aube levée, elles trouveront réponse l’une après l’autre, tout simplement, et surtout de façon rationnelle. Et il en sera de même pour vous une fois le premier pas franchi. Vous trouverez réponse à vos questions en temps voulu. Pour le moment, concentrez-vous sur une seule idée positive, prenez la main de vos enfants, leur doudou préféré, vos papiers d’identité et partez.
Contactez quelqu’un que vous connaissez et en qui vous avez confiance. Contactez la première personne qui vous vient à l’esprit. Contactez nos élus locaux ici : https://nslegislature.ca/members/profiles.
Trouvez une représentante à qui parler ou adressez-vous à son homologue masculin. Inutile de préciser que la violence conjugale n’a pas de genre.
Nos représentants ne se sont pas présentés à leur poste pour une question de rémunération, mais plutôt pour le pouvoir qu’il confère. Le pouvoir de se démarquer, de tendre la main et d’offrir une aide solide à tous ceux et celles qui en ont besoin. Leur temps vous est dû, ils sont en poste grâce à vous, ils vous écouteront. Ils ont accès à toute une gamme de programmes et services personnalisés pour que votre situation s’améliore, pour vous accompagner vers un avenir sain.
Vous n’êtes pas seuls.
C’est votre vie, la seule et unique jusqu’à preuve du contraire, et elle n’appartient qu’à vous, alors ne vous laissez pas réduire au silence.
Souvenez-vous que peu importe l’affection que vous trouverez tout au long du chemin, l’amour va et vient. Peut-être avez-vous une famille élargie, de proches collègues, des amis de longue date et plus encore, mais la seule personne présente à vos côtés depuis votre venue au monde, témoin des bons comme des mauvais jours, partageant vos succès et vos défaites, et ce jusqu’à votre dernier souffle, c’est vous-même.
Votre corps et votre esprit, pas de meilleurs amis qui soient.
Alors, respectez cette amitié, traitez-vous avec toute la dignité que vous méritez et prenez ce nouveau départ.
Article 1: Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits…