Les problèmes majeurs que rencontrent les francophones unilingues étaient au cœur de cette causerie. «Est-ce qu’un régime linguistique peut se transformer?» et «Comment expliquer le processus qui permet le changement du régime linguistique?» sont les deux questions essentielles soulignées par le conférencier.
Selon M. Normand, un régime linguistique «renvoie aux dimensions juridiques, politiques, symboliques et opérationnelles qui guident la prise de décision sur les politiques publiques et la définition des problèmes et des revendications en matière linguistique sur un territoire donné.» Le spécialiste en sciences politiques croit qu’il est difficile de transformer un régime linguistique sans un choc exogène, c’est-à-dire d’origine extérieure.
En effet, l’évolution du français en Ontario au cours des dernières années était au centre des débats. D’après M. Normand, qui a déjà réalisé plusieurs travaux sur la francophonie en Ontario, cette province a un régime linguistique plus généreux aux francophones en situation minoritaire.
Il ajoute que «le français est passé d’une langue prohibée dans les écoles publiques à une langue légitime dans les institutions gouvernementales à l’intérieur d’un siècle.» Certes, le français n’a pas encore un statut officiel en Ontario, mais le bilinguisme est présent dans beaucoup d’organismes publics.
Par ailleurs, plusieurs assistants à la causerie ont abordé la question de la place du français dans les services publics en Nouvelle-Écosse. L’usage du français dans l’administration reste un grand défi dans cette province anglodominante.
D’ailleurs, Karmen d’Entremont, qui est originaire de Par-en-Bas, a affirmé lors de la causerie que le français est plus présent à l’Hôpital de Yarmouth que dans l’une des écoles du Conseil scolaire acadien provincial (CSAP) qu’il connait.
Le CSAP est le seul conseil scolaire francophone de la Nouvelle-Écosse. Offrir aux élèves une éducation de qualité en français est le mandat de ce conseil. «Je l’ai dit sans exagération», a-t-il rajouté.
D’autres problèmes majeurs en Nouvelle-Écosse et dans d’autres provinces canadiennes ont été soulevés. Comme, entre autres, l’incapacité des agents de la police et des réceptionnistes de diverses institutions provinciales de s’exprimer en français. En raison de cette incapacité, des résidents francophones unilingues de ces provinces ne trouvent pas toujours les services dont ils ont besoin.
Dans le même esprit, Martin Normand, dit-il, connait des patients francophones au Canada qui sont victimes de leur incapacité de s’exprimer en anglais à l’hôpital.
Martin Normand est une figure de proue de la promotion de la francophonie canadienne. Depuis février 2021, il est le directeur de la recherche stratégique et des relations internationales à l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC).
Avant de décrocher ce poste, il était stagiaire postdoctoral à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa, où il a aussi coordonné le Groupe de recherche interdisciplinaire sur les pratiques d’offre active de services en français.
Il détient un doctorat en science politique de l’Université de Montréal. Les recherches de M. Normand portent sur les politiques linguistiques au Canada et sur la mobilisation des minorités linguistiques. Quant à l’ACUFC, elle regroupe les 22 collèges et universités de la francophonie canadienne.