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le Lundi 26 août 2019 16:06 Arts et culture

Le Festival de l’Escaouette – sa signification et sa représentation

Paul Angus Poirier a été fabuleux cette année dans le rôle de M. l’Escaouette pendant le Festival de l’Escaouette à Chéticamp. — Michel Soucy Photography
Paul Angus Poirier a été fabuleux cette année dans le rôle de M. l’Escaouette pendant le Festival de l’Escaouette à Chéticamp.
Michel Soucy Photography
CHÉTICAMP : Chéticamp et ses localités avoisinantes sont parmi les communautés acadiennes les plus dynamiques dans les provinces de l’Atlantique. Dans les années qui ont suivi la Déportation, ce sont les montagnes et le bord de mer qui ont attiré ici les Acadiens de la côte sud du Cap-Breton et de l’Île-du-Prince-Édouard. De nos jours, c’est la beauté sauvage du paysage, la culture particulière et l’hospitalité à nulle autre pareille qui attirent les visiteurs. Ce charmant village empreint du patrimoine français, offre des paysages magnifiques et un accueil chaleureux et bilingue de la part de ses résidents.
Le Festival de l’Escaouette – sa signification et sa représentation
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     Le peuple acadien est très fier de partager sa culture, son patrimoine et sa langue avec les innombrables visiteurs qui parcourent la piste Cabot, connue dans le monde entier. En 1976, les organisateurs du Festival de l’Escaouette ont choisi à l’unanimité un nom typique de notre région pour désigner cet événement culturel acadien qui se tient chaque été à Chéticamp. Le Festival de l’Escaouette a pour but de préserver le patrimoine acadien et de renseigner les résidents et les visiteurs ainsi que de renforcer les liens entre les organismes culturels acadiens de Chéticamp.

     Cette année marquait la 44édition de ce festival spécial. Pour beaucoup, le nom est assez familier, tandis que pour d’autres, qui s’amusent à essayer de prononcer le mot « escaouette », voici ce qu’il signifie. Pour définir le mot « escaouette », il faut remonter aux racines latines. En effet, en latin, le mot « esca » signifie nourriture. La date du 2 février place la célébration de la Chandeleur (ou Candelaria) quarante jours après Noël et poursuit le cycle religieux qui mène au dimanche de Pâques. D’ailleurs pour comprendre le mode de vie de nos ancêtres acadiens, il faut tenir compte du fait que toute leur vie était axée sur la foi et les croyances religieuses. De plus, cette date du 2 février est aussi le point médian entre le solstice d’hiver et l’équinoxe de printemps, qui est à la base de diverses célébrations européennes anciennes qui commémorent les débuts annuels de la saison agricole.

     Il convient également de souligner le lien entre la Chandeleur et le jour de la Marmotte, qui tombe à la même date. Cette tradition qui vise à prédire l’arrivée du printemps trouve également son origine dans le folklore européen. Pour l’Église, cependant, elle demeure un jour d’espérance et de lumière. C’est le moment d’honorer le Seigneur comme la Lumière du Monde et de nous rappeler que nous avons aussi cette lumière en nous. Lorsque nos ancêtres observaient la Chandeleur, ils célébraient surtout la fête de la nourriture. La Chandeleur, qui dérive du mot chandelle, est une vieille coutume encore soulignée chaque année dans de nombreuses régions du monde.

     Au début, l’organisation d’une telle fête était un effort communautaire. Les gens trouvaient une maison qui accueillerait ce rassemblement. Les 31 janvier et 1er février, les jeunes hommes des villages se rassemblaient avec leurs traîneaux et transportaient le bois de chauffage pour le poêle, les bacs pour la viande, les récipients pour la farine, le sucre, le sel, les légumes, entre autres. Trois traîneaux de chaque village faisaient du porte-à-porte et ramassaient de la nourriture. Le chef, portant une grande canne décorée de rubans, conduisait son groupe à la maison, frappait à la porte et demandait : « Voulez- vous fournir de la nourriture à la Chandeleur? » Si la réponse était affirmative, le chef se tournait vers ses compagnons et leur faisait signe d’entrer. Si les gens refusaient, le groupe continuait sa route, mais presque tous donnaient généreusement. Le groupe était invité à entrer dans les foyers et à jouer La danse de l’Escaouette. L’un derrière l’autre et les mains sur les épaules de celui devant soi, tout le monde dansait en cercle autour du leader en sautant à pieds joints. Le leader, au milieu, martelait le sol avec sa canne au rythme de la musique et chantait la chanson de l’Escaouette.

     Une fois la danse terminée, les propriétaires de la maison offraient aux hommes toute la nourriture qu’ils pouvaient donner, puis les hommes chantaient à leur tour : « En vous remerciant, mes gens d’honneur, d’avoir fourni pour la Chandeleur; un jour viendra, Dieu vous l’rendra. Alléluia! »

     Le jour de cette fête tant attendue, les gens commençaient à se rassembler au milieu de l’après- midi. Il y avait du violon, des rires et de la joie. Vers l’heure du souper, c’était le festin. Pendant les jours de rationnement, les temps étaient durs et les gens se réjouissaient de voir tant de nourriture! Le violon était omniprésent, les gens dansaient, buvaient et mangeaient jusqu’au lendemain dans l’après-midi.

     L’intérêt pour la Chandeleur dans notre région acadienne a commencé à s’émousser vers 1935. La jeune génération aimait aller en ville pour socialiser, et les personnes âgées devenaient trop vieilles pour organiser un tel événement. La fête de la Chandeleur est encore célébrée chaque année, mais à une échelle beaucoup plus modeste, habituellement par une partie de cartes ou une danse et un souper à la salle paroissiale.

     C’est pour redonner vie à cette tradition qu’est apparu le Festival de l’Escaouette. Pendant les festivités, M. l’Escaouette fait une apparition, surtout pendant le défilé, et montre alors le chemin avec sa canne. Comme vous pouvez le constater, même le nom du festival a une signification et des racines profondes pour le peuple acadien.

     Cette année, le Festival de l’Escaouette s’est déroulé du 31 juillet au 4 août 2019, mettant à l’honneur un riche éventail de musique et de culture acadienne.

Michel Soucy Photography