Farida Agogno
IJL – Réseau.Presse – Le Courrier de la Nouvelle-Écosse – Atl
Norma Dubé, présidente de l’Association francophone des ainés du Nouveau-Brunswick (AFANB), avance dans un premier temps que la conférence Bien vieillir en Acadie est une préparation aux États généraux sur le vieillissement, prévu du 8 au 10 mai 2025 à l’Université de Moncton.
Deuxièmement, dans le cadre du Congrès mondial acadien, c’était une occasion en or de rassembler des participants de diverses provinces, en particulier des provinces atlantiques.
Aussi, c’est une opportunité d’avoir une réflexion sur l’avenir de l’Acadie avec la participation d’une soixantaine de personnes.
Pour Mme Dubé, c’est un privilège de vieillir en français en Acadie, où les ainés, en tant que bâtisseurs de la région, ont une voix importante. Ainsi, pour assurer un avenir intergénérationnel, elle est d’avis qu’il est crucial de valoriser à la fois les jeunes et les ainés dans le projet de développement de l’Acadie.
Elle rapporte que durant la conférence, Suzanne Dupuis-Blanchard, spécialiste sur le vieillissement de la population, a fait une présentation sur le sujet, suivie de groupes de discussion enrichissants.
Par exemple, selon la présentation de Mme Dupuis-Blanchard, une personne sur 10 n’aurait pas besoin d’aller dans les foyers de soins. Mme Dubé pense que le dossier des soutiens à domicile est crucial dans les provinces atlantiques, car l’absence ou l’inaccessibilité de ces services est la principale raison pour laquelle une personne sur 10 se retrouve en résidence.
Mme Dupuis-Blanchard souligne qu’il est important de reconnaitre le rôle des proches aidants. Ces derniers, selon elle, doivent être soutenus et informés sur leur rôle et sur la manière de prendre soin d’eux-mêmes pour continuer à aider les autres.
«En tant qu’infirmière de formation, je pratique encore un peu en santé communautaire. Je constate que le système de santé doit mieux former ces proches aidants», avance-t-elle.
«Il est essentiel de leur fournir des informations sur le vieillissement, sur la manière d’éviter des blessures lorsqu’ils aident leurs proches à se déplacer, sur l’organisation des soins d’hygiène, et bien d’autres aspects», ajoute-t-elle.
Une autre donnée importante partagée lors de cette conférence est que 45 % des facteurs qui mènent à la démence peuvent être modifiables. Les solutions citées pendant les discussions sont l’activité physique et l’activité du cerveau à travers la lecture, la participation à des conférences et la baisse du taux de cholestérol.
«Les gens ont été surpris d’apprendre qu’il existe des facteurs qui peuvent être pris en charge en dehors des traitements médicamenteux ou des avancées médicales majeures. Dans la salle, j’ai ressenti une prise de conscience, une sorte de soulagement, en constatant qu’il y a des actions concrètes à entreprendre», dit-elle.
La participation au bénévolat a également été un point de discussion. Selon Mme Dubé, certaines communautés acadiennes ont déjà mis en place des initiatives pour coordonner le bénévolat en soutien aux ainés à domicile.
Une des suggestions reçues lors de nos discussions est qu’il faudrait une concertation plus large à l’échelle atlantique, afin que les associations francophones des provinces atlantiques travaillent ensemble plus étroitement.
D’ailleurs, Mme Dubé souligne qu’il est absolument crucial que les ainés en Acadie puissent vieillir en français. En vieillissant, beaucoup de gens qui maitrisent plusieurs langues reviennent naturellement à leur langue maternelle.
Mme Dupuis-Blanchard pense que l’accès aux services en français est le premier défi souvent rencontré par les ainés.
Par exemple, dans une communauté majoritairement francophone comme la Péninsule acadienne, au Nouveau-Brunswick, il est possible d’avoir accès à un médecin de famille ou à une infirmière praticienne qui parle français. Cependant, dès qu’il s’agit de consulter un spécialiste, les ainés se heurtent souvent à la barrière de la langue, car ces spécialistes sont souvent unilingues anglophones.
Par conséquent, la langue est non seulement un moyen de communication. «Mais elle est aussi au cœur de notre culture et de notre identité. Il est essentiel que nos ainés puissent continuer à vivre cette culture avec dignité et respect dans leurs années avancées», précise Mme Dubé.
Le deuxième grand défi actuel est l’accès aux soins de santé primaires, tels que les médecins de famille et les infirmières praticiennes.
Le troisième défi que rencontrent les ainés c’est la connaissance des services disponibles. Mme Dupuis-Blanchard raconte que cela touche à la communication des services offerts, qui est souvent insuffisante. Même si des publicités existent, les gens ne prêtent pas attention aux services tant qu’ils ne se sentent pas concernés.
Et quand les ainés ont accès à ces services, ils se heurtent à un autre problème, qui est celui de la complexité du processus pour y accéder, avec des questions qui découragent parfois beaucoup.
Voilà pourquoi Mme Dubé suggère que les acteurs politiques investissent plus dans l’amélioration des soins de longue durée et les soutiens à domicile.
«Nous ne pourrons jamais construire suffisamment d’édifices pour loger tous les ainés, et ce n’est pas forcément souhaitable. Il est donc essentiel de repenser nos investissements et de mettre en place des soutiens communautaires permettant aux ainés de demeurer chez eux aussi longtemps que possible, tout en étant en sécurité», dit-elle.
Selon Mme Dupuis-Blanchard, la promotion de la santé devrait faire partie intégrante des soins que l’on peut offrir à une population vieillissante.
Elle soutient qu’il est crucial que les transitions entre les différents niveaux de soins, de la promotion de la santé, aux soins à domicile jusqu’à l’hospitalisation ou l’admission en foyer, soient bien soutenues et envisagées comme un continuum, et non comme des étapes fragmentées.
«Les gouvernements doivent également être partie prenante de ces discussions, être au courant des besoins des citoyens, et ne pas être mis à l’écart. Je pense que nous avons tous un rôle à jouer», dit-elle.
«Nous avons tous une responsabilité dans notre vieillissement. Oui, nous avons besoin de soutien, de politiques, de stratégies, et de tout ce qui va avec, mais il faut que tout le monde soit impliqué, que ce soit les familles, le gouvernement, ou les chercheurs», complète-t-elle.
Pour répondre aux différents défis du vieillissement, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a mis en place plusieurs initiatives, notamment l’amélioration des soins de longue durée et, récemment, le Programme de subventions pour les collectivités amies des ainés.
Par exemple, un jardin communautaire de Mahone Bay a reçu un financement pour aider les ainés à avoir une vie active et saine.
Le gouvernement a aussi investi plus de 530 000 $ pour soutenir d’autres projets communautaires comme des cours de yoga sur chaise, des ateliers de cuisine et activités sociales mensuelles.