le Mercredi 9 octobre 2024
le Vendredi 6 septembre 2024 11:00 Nouvelles

Lutter contre la violence et le harcèlement à l’école

Des ressources adaptées permettent de diminuer la violence et le harcèlement à l’école.  — PHOTO: Mikhail Nilov – Pexels
Des ressources adaptées permettent de diminuer la violence et le harcèlement à l’école.
PHOTO: Mikhail Nilov – Pexels
FRANCOPRESSE – Le retour en classe n’est pas bienvenu pour tous les jeunes. La violence et le harcèlement sont encore bien présents dans les cours d’école et sur les réseaux sociaux. Des solutions existent, mais il faut trouver puis mettre en place les bonnes ressources et connaitre les racines du problème.
Lutter contre la violence et le harcèlement à l’école
00:00 00:00

Eya Ben Nejm – Francopresse

Si les formes de violence les plus visibles et celles qui ont tendance à recevoir le plus d’attention sont physiques, il existe une «quantité très inquiétante de violences verbales, également des situations d’intimidation et de harcèlement en lien avec les médias sociaux», rappelle la présidente de l’Association des enseignantes et des enseignants francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), Stéphanie Babineau.

La violence peut aussi s’exprimer de diverses façons dans la cour de récréation, comme par l’exclusion consciente d’un enfant ou par des commentaires ou des comportements qui dénigrent et humilient, énumère la vice-présidente, Opérations cliniques et chef des services cliniques chez Jeunesse, J’écoute, Andréanne Deschamps.

À lire aussi : protéger les jeunes face aux conséquences de la cyberintimidation

L’organisme Jeunesse, J’écoute propose des services 24 h/24 et 7 jours sur 7 pour les personnes victimes de harcèlement ainsi que celles qui intimident.

PHOTO: Courtoisie

Le contexte social et scolaire

Selon le professeur au Département de psychopédagogie et d’andragogie de la Faculté des sciences de l’éducation à l’Université de Montréal, François Bowen, «pour lutter contre la violence à l’école, il faut regarder dans quel milieu l’enfant se trouve».

Il précise ne pas faire référence aux milieux riches ou défavorisés, mais plutôt au milieu scolaire.

Les défis vont plutôt surgir en fonction du style de gestion de la direction, du personnel, des pratiques éducatives et surtout des «ressources qui sont mises en place pour soutenir les enfants», détaille-t-il.

Dans le cas du harcèlement, si le milieu éducatif ne réussit pas à encadrer et résoudre le problème, le harceleur continuera ses actions. Celui-ci voit dans l’intimidation un moyen de «prendre du prestige, parce qu’il vient avec des supporteurs, des bystander».

Le professeur critique aussi la phrase parfois prononcée par les adultes dans la cour de récréation : «Ce n’est pas grave, ils se chamaillent.» En ignorant une situation peut-être plus problématique, les adultes n’élèvent pas de barrières contre les actions des harceleurs.

De plus, un conflit entre des élèves et du harcèlement sont deux problèmes distincts. Ils doivent être résolus de manière différente, puisqu’on ne parle pas ici des mêmes mécanismes psychologiques, précise François Bowen.

Des jeunes qui se disputent n’ont pas appris à réguler leurs émotions trop fortes, donc ils se précipitent dans un conflit avant d’essayer de régler le problème d’une autre façon. Dans le cas du harcèlement, l’intimidateur agit par intérêt personnel et peut être dépourvu d’empathie.

Stéphanie Babineau rappelle que, malgré la bonne formation des enseignants, ils ont besoin d’experts comme des psychologues et des travailleurs sociaux pour aider les jeunes à gérer leurs émotions. 

PHOTO: Courtoisie

Le pouvoir de dénoncer

Dénoncer peut être difficile pour les jeunes enfants témoins de harcèlement, informe Andréanne Deschamps. Ils peuvent toutefois discuter avec la victime, lui dire que ce qui se passe n’est pas normal et l’aider à aller en parler à un adulte.

Ça permet de «démontrer qu’on est allié avec l’autre jeune, que ce soit un ami ou pas, de la classe ou dans l’école, qui a subi ce comportement-là. Ça peut déjà avoir un effet très positif pour la personne qui le subit».

Une autre solution est de confronter le harceleur en groupe pour lui dire que son comportement n’est pas acceptable. La vice-présidente de Jeunesse, J’écoute explique que l’effet de groupe peut parfois arrêter les agresseurs.

Les jeunes témoins peuvent aussi en parler avec des adultes, tels que leurs parents, qui pourraient à leur tour en informer la direction du cas de l’élève harcelé, ajoute Andréanne Deschamps.

Ressources adaptées

Parfois, les ressources mises en place par les écoles ne répondent pas aux besoins des enfants, indique Stéphanie Babineau.

Par exemple, depuis l’adoption du projet de loi 85 au Nouveau-Brunswick en 1986, les enfants avec des besoins particuliers sont intégrés aux mêmes écoles que les autres enfants. Toutefois, les ressources pour aider ces enfants ne sont pas disponibles dans toutes les écoles, affirme-t-elle.

Pour offrir les ressources nécessaires, il reste indispensable d’avoir du financement, déplore la présidente de l’AEFNB.

À lire aussi : Difficile pour les conseils scolaires francophones d’exercer leurs pleins pouvoirs

Stéphanie Babineau tient à rappeler que malgré une bonne formation de pédagogue, les enseignants ne sont pas des experts en psychologie ou des émotions. Il est préférable d’avoir un psychologue, un travailleur social ou un intervenant en toxicomanie, souligne-t-elle.

L’accès à ce genre de services dans les écoles francophones peut être long, ce qui peut permettre à la situation de s’envenimer. Le moment venu, les psychologues doivent «intervenir avec les élèves qui sont en situation de crise parce qu’on va chercher à éteindre le feu en premier», souligne Stéphanie Babineau.

François Bowen rappelle qu’un psychologue est nécessaire, mais pas suffisant. Il faut former les directions d’école, les éducateurs spécialisés et les enseignants à la prévention. Il faut effectuer un travail d’équipe, encourage-t-il.

À l’extérieur des murs de l’école, il y a des services d’aide, comme Jeunesse, J’écoute, disponible partout au Canada 24 heures sur 24, rappelle Andréanne Deschamps. 

En plus du service de texto, l’organisme propose des outils pour apprendre à gérer sa colère, ses émotions, trouver des alliées. Il peut en outre offrir des ateliers en ligne pour les classes afin d’aborder divers sujets, comme le bienêtre, l’intimidation et la violence.

Selon François Bowen, le milieu scolaire est la première ligne de défense contre la violence envers les élèves.

PHOTO: Courtoisie

Besoin de l’intelligence émotionnelle

Pour prévenir la violence et le risque de harcèlement, François Bowen encourage les établissements à développer l’intelligence émotionnelle chez les jeunes.

«La gestion de la colère, la gestion des conflits, ce sont des choses qui font partie d’un apprentissage normal pour tous les jeunes, puis aussi dans notre vie adulte», appuie Andréanne Deschamps.

D’ailleurs, Stéphanie Babineau observe que les enfants «ont beaucoup de défis quand ça vient à la régulation de leurs propres émotions, quand ça vient à la gestion de situations plutôt difficiles».

L’objectif est donc d’outiller les enfants pour gérer des évènements stressants, explique François Bowen. Se faire exclure d’un groupe d’amis ou avoir de la difficulté en amitié peut être une source de stress et de mal être.

L’intelligence émotionnelle permet aussi de développer l’empathie, ce qui manque surtout chez les intimidateurs. Cela réduirait le nombre de cas de harcèlement, propose François Bowen.