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le Mardi 10 Décembre 2024 7:00 Nos communautés - Clare

L’ancienne église Sainte-Marie de la Pointe sera-t-elle démolie?

L’avenir de l’édifice Sainte-Marie de la Pointe semble autant sombre que le ciel gris qui l’entoure. — PHOTO : Richard Landry
L’avenir de l’édifice Sainte-Marie de la Pointe semble autant sombre que le ciel gris qui l’entoure.
PHOTO : Richard Landry
POINTE-de-l’ÉGLISE - Neuf mois après avoir été mis en vente par l’archidiocèse de Halifax-Yarmouth, l’édifice de l’ancienne église Sainte-Marie de la Pointe-de-l’Église n’a pas été vendu. Elle était en vente entre février et septembre dernier. Le diocèse a donc décidé de lancer un appel d’offres pour la démolition de l’édifice.
L’ancienne église Sainte-Marie de la Pointe sera-t-elle démolie?
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Les inspecteurs de la Municipalité de Clare ont jugé que l’état de la structure la rendait dangereuse. David O’Carroll, responsable des bâtiments à l’archidiocèse, a conclu que la démolition était la seule solution.

L’édifice, cependant, ne peut pas être démoli avant que l’on retire la désignation patrimoniale de la Nouvelle-Écosse, un processus qui pourrait durer jusqu’à neuf mois, estime André Valotaire, responsable du maintien de l’édifice depuis 25 ans. 

Kevin Barrett, coordinateur du programme des propriétés du patrimoine de la province, sera dans la région durant la semaine du 8 décembre afin d’évaluer la situation de l’édifice et décider si la désignation sera enlevée. 

Formée en 2013, la Société Édifice Sainte-Marie de la Pointe, un comité de gens locaux, a œuvré pendant neuf ans pour trouver les fonds et les moyens de préserver l’édifice (voir édition du 11 novembre 2022 du Courrier de la Nouvelle-Écosse, p. 5). 

À partir d’un plan d’action préparé par le Conseil de développement économique de la Nouvelle-Écosse (CDÉNÉ) et d’une étude pour une campagne de fonds par la firme Bloom en 2018, il restait à développer un Plan de campagne nationale. 

Un appel d’offres a été lancé par la Société en 2022 pour développer un tel plan, sans aucun intérêt de la part des consultants qui pouvaient faire le travail. La Société a donc décidé en 2022 de mettre fin à ses démarches pour la restauration et la préservation de l’édifice.

De plus, la Municipalité de Clare a demandé à l’archidiocèse d’enlever un des fleurons sur un des quatre petits pics au-dessus du clocher, qui est plié et qui risque de tomber sur la propriété. Le travail sera fait prochainement. Entretemps, l’archidiocèse a lancé un appel d’offres pour la démolition de l’édifice. 

En ce qui concerne les demandes de préserver l’église, il faut être réaliste.

— André Valotaire

Trois entreprises ont déjà manifesté un intérêt. Deux d’entre elles proposent de la démolir complètement alors qu’une troisième propose de la démanteler pièce par pièce et de conserver le bois de charpente et le matériel, qui peut être préservé ou réutilisé. Le démantèlement permettrait de voir comment l’édifice a été bâti, mais dans le sens inverse.

On voudrait sauver, entre autres, les vitraux, les statues, l’autel du père Sigogne, la pierre tombale du père Sigogne, des peintures et les trois cloches fondues en France. 

Le comité du musée a déjà déplacé en un lieu sûr à Yarmouth tous les articles du musée qui était dans l’édifice. On vise à recréer un musée paroissial dans l’avenir dans un autre local de la Municipalité.

«En ce qui concerne les demandes de préserver l’église, il faut être réaliste, selon André Valotaire. Les couts des réparations sont estimés à 10 millions de dollars, un montant qui aurait probablement augmenté depuis que l’estimé a été fait.  Ces réparations serviraient à ramener l’église à sa condition originale, sans compter les couts pour l’isolation des murs.» 

«Même avec l’isolant, le cout du chauffage pour une si grande espace serait très élevé. Et à quoi servirait-elle? Le culte catholique de la région n’en a pas besoin. Il y a d’autres églises locales qui sont plus économiques à gérer. Il y aurait la possibilité de s’en servir à d’autres buts, mais il faudrait trouver une société capable de gérer quelque sorte d’entreprise et générer un revenu d’au moins 100 000 $ par an pour couvrir les couts d’opération, tels que la chaleur, l’électricité, les assurances, etc. À chaque fois qu’il vente, il y a des bardeaux qui tombent.»

Pour sa part, Pierre Comeau, dernier président de la Société Édifice Sainte-Marie de la Pointe, est très attristé par ces développements. «C’est triste avec tout le travail qu’on a fait, mais on accepte la réalité et la décision de l’archidiocèse de le mettre en vente. Il n’y a pas d’autres solutions. L’édifice devient dangereux, si rien ne se fait. C’est un monument des Acadiens qui disparait de la région.»

Le président sortant se souvient d’un commentaire d’un citoyen de Clare, qui a dit à un média francophone qu’il blâme l’archidiocèse pour l’échec du groupe de gens voulant la préserver. «Je pense que la tactique de négociation de l’archidiocèse était d’écœurer et de fatiguer le petit groupe communautaire qui voulait sauver l’édifice jusqu’à ce qu’il n’ait plus rien à dire.» 

Pierre Comeau, au contraire, a louangé la collaboration que la Société a eue avec l’archidiocèse, qui était prêt à vendre l’édifice pour 1 $ et qui a accordé une extension d’un an à l’entente avec la Société afin de lui permettre de continuer ses démarches. La Société a décidé de mettre fin à son entente avec l’archidiocèse en septembre 2023.

Emma Lang, directrice générale de Heritage Trust of Nova Scotia, souhaite que cette conclusion respecte les volontés de la communauté et que les travaux soient faits dans le respect de l’environnement. «On comprend qu’on ne peut pas tout sauver, a-t-elle dit. Il existe des entreprises qui peuvent faire la démolition de façon responsable en consultant la communauté.»

Pour sa part, la Municipalité de Clare est aussi attristée par la démolition éventuelle, selon un communiqué émis le 4 décembre. «Bien que cette nouvelle soit regrettable, l’état de l’église s’est détérioré à un point tel qu’elle devra être démolie ou réparée, cette dernière solution semblant de plus en plus impossible», a déclaré la Municipalité.

L’état actuel de l’église, combiné aux vents forts de l’hiver et aux conditions météorologiques défavorables à venir, signifie qu’elle est malheureusement devenue un danger pour la sécurité.

— Municipalité de Clare

«Bien que la Municipalité de Clare n’ait pas joué un rôle déterminant dans le processus décisionnel, nous avons ordonné au diocèse d’enlever une flèche au  haut de l’ancienne église en octobre, car elle risquait de tomber. La sécurité publique est primordiale et la Municipalité respecte ce que nous supposons être une décision difficile à prendre par l’archidiocèse.»

Complétée en 1905, l’ancienne église, la plus grande bâtie en bois en Amérique du Nord, a été désacralisée le 23 novembre 2023. La dernière messe dans l’édifice date de 2019, à l’occasion de la Fête de Noël. 

Pendant trois ans avant ça, elle était seulement utilisée à l’occasion, les messes hebdomadaires ayant lieu au sous-sol de l’ancien presbytère juste à côté, qui a été vendu depuis lors.