Vous l’avez sans doute lu ou entendu quelque part. Le mercredi 29 novembre dernier, le Comité international olympique a annoncé ouvrir un « dialogue ciblé » avec la France pour les Jeux olympiques d’hiver de 2030.
Une manière polie d’annoncer que, sauf catastrophe majeure, les Alpes françaises succèderont à Milan et à Cortina d’Ampezzo, villes italiennes hôtes de l’édition de 2026.
Sans doute échaudés par les nombreux déboires que connait l’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024, les Français n’ont pas sauté de joie en apprenant la nouvelle. Ils risquent de s’en mordre les doigts, car c’est peut-être bien une des toutes dernières fois que la France pourra accueillir cette prestigieuse compétition hivernale.
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En aout dernier, une étude a montré qu’avec un réchauffement de la planète de + 3 °C, 91 % des stations de ski européennes seraient menacées de fermeture d’ici 2100.
En France, où près de 150 stations font déjà partie de l’histoire ancienne, skier dans les Pyrénées pourrait devenir quasi impossible vu que 98 % des stations sont en danger.
En première ligne, les athlètes internationaux ont déjà dû faire évoluer leur pratique. Terminés les stages estivaux sur les glaciers alpins. L’Amérique du Sud est devenue la nouvelle destination privilégiée pour leurs entrainements de présaison.
Déjà limitées dans le temps, les compétitions annuelles sont, elles, de plus en plus incertaines. Si cette saison ce sont les chutes de neige et les fortes rafales qui les ont mises à mal, l’hiver dernier, c’était les températures anormalement élevées en Europe entre mi-décembre et mi-janvier qui ont entrainé des annulations en cascade.
À tel point que plusieurs athlètes, dont la vedette féminine américaine de ski alpin Mikaela Shiffrin, ont appelé la Fédération internationale de ski et de snowboard à faire plus d’efforts en faveur de l’environnement.
À tel point aussi que le biathlète français Quentin Fillon Maillet a dû ressortir ses skis à roulettes, qu’il n’utilise normalement que l’été, pour pouvoir s’entrainer lors de la période de Noël dans le massif du Jura.
Quelques arpents de neige… en moins
Si les canons à neige parviennent parfois à sauver les meubles, personne n’est dupe.
De plus en plus de compétitions de ski de fond se déroulent sur de minces pistes enneigées, dont la blancheur tranche singulièrement avec le reste du décor, presque printanier.
On se souvient aussi des controverses entourant les derniers Jeux olympiques d’hiver, qui se sont disputés à Pékin en 2022, dans une zone géographique qui ne reçoit que 3 cm de neige par année. Le monde à l’envers.
Au Canada, la problématique est plus difficile à saisir. De façon contre intuitive, certains chercheurs ont montré que le réchauffement climatique va de pair avec une hausse des chutes de neige, en raison du déplacement de l’air arctique vers le sud.
Une autre étude québécoise de 2019 prédit que les stations de ski vont devoir s’adapter d’ici 2050, parce que la saison risque d’être réduite de 10 à 20 jours et la longueur des pistes de 20 à 30 %.
Des athlètes de Nouvelle-Écosse ont témoigné l’hiver dernier de leurs difficultés à s’entrainer sur leurs terres et ont dû voyager au Nouveau-Brunswick ou au Québec pour se préparer convenablement.
« Nos centres de ski n’ont pas été en mesure de fabriquer assez de neige et de recevoir suffisamment de neige naturelle pour construire des parcours convenables », expliquait à Radio-Canada Alex Ryan, l’entraineur-chef de l’équipe provinciale de style libre et directeur technique de Planche à neige Nouvelle-Écosse.
Du ski au milieu du désert
Rassurez-vous néanmoins, le génie humain est en train de trouver la parade pour que nous puissions continuer à skier en toute tranquillité.
Puisque la neige se raréfie dans les régions où elle abondait historiquement, allons donc dans les pays où elle n’existait pas!
Vous avez surement entendu parler de la plus grande piste de ski intérieure, qui se situe dans un centre commercial de Dubaï ? Et bien, ça a donné des idées au voisin saoudien, qui va accueillir les Jeux asiatiques d’hiver de 2029.
Oui oui, vous avez bien lu, des épreuves de ski, de planche à neige et de patins vont se dérouler dans un pays désertique, aux températures élevées, même si elles sont parfois légèrement négatives dans les montagnes du Nord-Est (mais les précipitations y sont faibles).
Pour cela, le pays du Golfe, qui ne se refuse rien, prévoit de construire une mégalopole futuriste nommée Neom, moyennant des centaines de milliards de dollars.
Tout cela n’est pas vraiment au gout de Greenpeace, qui dénonce un projet dangereux pour les écosystèmes de la région.
Polluer pour contrer les effets du réchauffement climatique, c’est le serpent qui se mord la queue. Skions donc dans la péninsule arabique. Cela nous permettra, dans quelques années, d’assister au Paris-Dakar dans les Rocheuses canadiennes.
Timothée Loubière est journaliste pupitreur au quotidien Le Devoir. Avant de poser ses valises au Québec en 2022, il était journaliste sportif en France, notamment au journal L’Équipe.