le Jeudi 21 septembre 2023
le Mercredi 26 juillet 2023 11:00 Rubrique - Le Carrefour des Francophones

Les apports des écrivains de l’Afrique à la littérature francophone – 1re partie : l’Afrique subsaharienne

Léopold Sédar Senghor, une figure iconique de la poésie en Afrique francophone.  — PHOTO(S) - Wikipedia
Léopold Sédar Senghor, une figure iconique de la poésie en Afrique francophone.
PHOTO(S) - Wikipedia
Cette chronique se veut un survol de la littérature francophone en Afrique subsaharienne. Elle est rédigée grâce aux recherches de nombres auteurs, spécialement Christiane Ndiaye, qui a dirigé la rédaction du livre Introduction aux littératures francophones, paru en 2004.
Les apports des écrivains de l’Afrique à la littérature francophone – 1re partie : l’Afrique subsaharienne
00:00 00:00

L’Afrique subsaharienne est dotée d’un patrimoine de littérature très riche. Avant l’apparition de l’imprimerie et des maisons d’édition, une littérature orale existait. Cette tradition, transmise de génération en génération, était très connue en occident. 

D’ailleurs, dans le livre en question, Christiane Ndiaye et Josias Semujanga affirment que les contes, les proverbes et les légendes africains étaient transcrits et traduits par des missionnaires, des ethnologues, des administrateurs et des voyageurs occidentaux ayant séjourné en Afrique, et cela, depuis au 19e siècle. 

Parmi les plus connues des transcriptions et adaptations produites par des écrivains africains, il faut citer Les Contes d’Amadou Koumba (1947) et Les Nouveaux Contes d’Amadou Koumba (1958) de Birago Diop du Sénégal, Les légendes africaines (1954) de Bernard Dadié de la Côte-d’Ivoire, Koumen, textes initiatiques des pasteurs peuls (1961) et Kaïdara (1969) du Malien Amadou Hampâté Bâ. 

Après la période de la décolonisation de l’Afrique, qui a ouvert la voie à l’implantation d’imprimeries et de maisons d’édition, les auteurs africains commençaient à produire régulièrement. De plus, quelques publications commençaient à paraitre dans des périodiques. 

Cheikh Anta Diop, historien, anthropologue et linguiste sénégalais. Grâce à son œuvre, l’Afrique est replacée au cœur des sciences humaines et de l’histoire mondiale.

La littérature de l’Afrique subsaharienne a connu d’autres facteurs qui lui ont causé une perte de force, dont la censure des gouvernements pratiquant la dictature et la question de scolarisation pour les jeunes africains. 

Parmi les premiers écrivains de la littérature francophone en Afrique subsaharienne, on peut citer Felix Darfour, considéré d’ailleurs comme précurseur de la négritude, Léopold Panet, auteur de Esquisses sénégalais, ou encore l’abbé Moussa Paul Holle et l’abbé Léopold Diouf du Sénégal.   

Au début du 20e siècle, une littérature en prose a vu le jour avec Amadou Mapaté Diagne, Bakary Diallo, Massyla Diop et Ousmane Socé, pour ne citer que ces auteurs. C’est dans ce contexte que René Maran a reçu en 1921 le premier prix « Goncourt » attribué à un roman africain, Batouala, véritable roman nègre.  

Si la littérature francophone était née en prose, avec Léopold Sédar Senghor, la poésie africaine a fait son entrée avec éclat sur la scène littéraire mondiale. Mis à part Senghor, d’autres poètes se sont taillé une place de choix sur la scène littéraire mondiale. Ils sont considérés comme des poètes de la première génération. Ils sont, entre autres, Birago Diop, David Diop, Jean-Joseph Rabearivelo et Bernard Dadié. 

D’autres poètes ont marqué la poésie africaine, soit Paulin Joachim, Émile Ologoudou, Titinga Frédéric Pacéré, Fernando D’Almeida et Marie-Léontine Tsibinda. 

Le roman est le premier genre de la littérature écrite pratiqué au début du siècle par les écrivains de la langue française en Afrique. Il y avait deux tendances chez les premiers romanciers africains : certains s’attachaient aux valeurs et pratiques de l’Afrique traditionnelle, d’autres dénonçaient les humiliations, les préjugés raciaux et l’oppression. À noter que des femmes comme Marie-Claire Matip, Aminata Sow Fall, Nafissatou Diallo et Aoua Keita ont aussi marqué le romantisme africain. 

Le théâtre écrit en langue française commence à voir le jour dans le contexte colonial à l’époque de la négritude, dans les écoles implantées en Afrique par les missionnaires chrétiens de l’administration coloniale. Plusieurs grands noms ont marqué le théâtre de la langue française en Afrique, parmi lesquels on peut citer Bernard Bindin, Guillaume Oyono-Mbia et Alexandre Kum’a Ndumbe III. 

Cependant, la grande dame du théâtre africain, c’est la Camerounaise Werewere-Liking (née Eddy-N jock). Quoique le théâtre africain soit méconnu de la scène internationale, c’est un genre qui s’adresse plus directement au public africain, contrairement au roman ou l’essai.

L’essai est plus connu en Afrique sous l’appellation de littérature exotique. Des essayistes comme Amadou Mapaté Diagne, Bakary Diallo, Felix Couchoro et d’autres ont publié dans le cadre d’une institution littéraire en cours de formation dans les colonies d’Afrique et dominée par les écrivains coloniaux. 

Il est utile de souligner que la critique afrocentriste a dominé la littérature africaine. Ce courant se situe dans l’héritage de l’abbé Grégoire qui, dans son essai De la littérature des nègres (1808), se situe dans le cadre des activités pour l’abolition de l’esclavage dont il était un partisan dévoué. C’est un courant visant à valoriser l’humanité des noirs et l’universalité de leurs valeurs culturelles. 

L’abbé a beaucoup influencé la critique africaine. Cette thèse de l’africanité se trouve aussi chez Janheinz Jahn avec son essai Muntu : l’homme africain et la culture néo-africaine (1958). D’autres essayistes comme Frantz Fanon, Robert Cornevin et Thomas Melone ont été influencés par ce courant. 

Ce survol sur la littérature francophone en Afrique subsaharienne ouvre une fenêtre sur l’apport des écrivains de cette région à ladite littérature. Ainsi, la seconde partie de cette chronique présentera le Maghreb, qui a aussi vu apparaitre nombre d’auteurs majeurs.