le Jeudi 21 septembre 2023
le Vendredi 16 juin 2023 11:00 Rubrique - Le Carrefour des Francophones

Le français perd-il des plumes en Afrique au profit du mandarin ?

  PHOTO - James Wiseman (Unsplash)
PHOTO - James Wiseman (Unsplash)
Si la dernière chronique du Carrefour des Francophones a ouvert une fenêtre sur la situation de la francophonie dans l’Asie-Pacifique, un espace géographique de l’Asie, celle-ci veut mettre en lumière le rapport entre l’Asie, particulièrement la Chine, et la Francophonie, par l’entremise de l’Afrique subsaharienne.
Le français perd-il des plumes en Afrique au profit du mandarin ?
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PHOTO - qi xna (Unsplash)

Certes, la Chine est très présente dans cette région en Afrique pour des raisons économiques et politiques. Néanmoins, c’est une présence qui a aussi ses impacts sur la Francophonie et la langue française, car la Chine y débarque non seulement avec son pouvoir économique, mais aussi avec sa langue et sa culture dans des espaces francophones.  

Il est clair que l’Afrique est un réservoir richissime de matières premières. De ce fait, depuis plusieurs décennies, surtout après son ouverture sur le monde en 1978, la Chine trouve en Afrique une source d’approvisionnement de ces matières. En ce sens, Geoffroy Theodore Aliha précise que « la Chine est l’un des partenaires privilégiés qui accompagnent le développement de l’Afrique. Présente dans tous les secteurs économiques des pays africains, elle injecte depuis plus de trois décennies des milliards de yuans [l’unité monétaire de la Chine] dans des projets de réalisation des infrastructures. » 

Si les succès des entreprises chinoises pèsent sur les parts de marché des entreprises françaises, comme a précisé Arnaud Schaumasse, force est de constater que cette présence chinoise a aussi des impacts sur la langue et la culture françaises sur le continent noir. D’ailleurs, depuis l’arrivée des Chinois, le mandarin triomphe au désavantage du français. Le mandarin « est le passeport qu’il faut posséder pour s’assurer l’entrée dans le monde des affaires », précise Martin Mateso. Plusieurs pays en Afrique ont déjà inclus la langue chinoise dans leur programme scolaire. Il y a aussi des panneaux en Afrique qui sont écrits en deux langues, dont le mandarin. 

En plus, depuis le début des années 2010, la Radio Chine internationale (RCI) s’installe en Afrique dans plusieurs grandes villes. Par l’entremise de cette radio de l’État chinois, ce dernier tente de peaufiner son image dans les territoires africains, comme la France le fait depuis des lustres dans nombre de pays avec Radio France internationale (RFI). 

Il est évident que ces radios publiques internationales sont des outils d’influences diplomatique et culturelle, voire des instruments de propagande. En ce sens, Selma Mihoubi croit que « RCI porte les ambitions globales du pouvoir communiste chinois auprès des opinions publiques africaines ». 

Les Chinois et les francophones ne se rencontrent pas seulement en Afrique. La Chine reçoit une kyrielle de Français sur son territoire chaque année. Ce pays est un endroit très accueillant pour les locuteurs du français. Outre les francophones venant de tous les coins du monde qui sont en Chine, plus de 30 000 Français y vivent.  

La Chine veut coute que coute accaparer des territoires francophones et contribuer à leur développement. Des entreprises chinoises ont construit des routes et des hôpitaux, entre autres. Les dirigeants chinois font parler des dirigeants africains à la RCI afin de témoigner de leur appréciation sur la coopération. Selma Mihoubi croit que c’est « une manière de légitimer les actions de Pékin ». Ce sont des initiatives gagnant-gagnant, laissent croire des dirigeants africains. 

En somme, la présence de la Chine en Afrique subsaharienne, particulièrement dans les espaces francophones, n’est pas innocente. Contrairement à la France, qui n’est pas souvent vue de bon œil en Afrique, surtout en raison de la colonisation et de l’exploitation, la Chine est souvent perçue comme un bienfaiteur. Pékin est considéré par plusieurs comme un partenaire commercial idéal. 

En tout cela, le mandarin apporte plus de profits économiques que le français sur le continent noir. Aujourd’hui, des enseignants locaux en Afrique reçoivent une formation pour maitriser et enseigner le mandarin. La Chine utilise ses pouvoirs économiques pour imposer sa langue. Il faut parler le mandarin pour travailler dans les entreprises chinoises qui offrent un gentil salaire. Pour cela, les jeunes africains par millier apprennent cette langue.