Les premières, c’est-à-dire les élites intellectuelles, s’impliquent dans leurs milieux par l’entremise des recherches, des conférences, des enseignements, des publications dans des revues, entre autres. Les deuxièmes, c’est-à-dire les élites politiques, s’impliquent dans toute la sphère politique, tant sur le plan national qu’international.
Nous avons aussi montré que la francophonie canadienne fait l’objet de débat, d’une part, au plus haut niveau de l’État dans les provinces par l’entremise des élites politiques, et, d’autre part, à l’échelle internationale, par exemple au Sommet de la francophonie.
Outre ses deux types d’élites qui occupent les premiers rangs dans les milieux francophones en situation minoritaire, il y a aussi les élites économiques qui ont un grand poids dans la balance à travers leur pouvoir économique. Elles peuvent renforcer l’économie de leurs milieux en créant des emplois.
La présente chronique s’intéresse à des investissements qui se font en Acadie en vue d’attirer des travailleurs, en particulier des francophones. Cependant, tenant compte de la situation démographique du Canada où certaines villes ont seulement des milliers d’habitants, la tâche de ces investisseurs paraît plus complexe. Ils doivent créer des opportunités non seulement pour que les gens de ces milieux n’aillent pas ailleurs, c’est-à-dire dans les grandes villes comme Montréal, Toronto, Vancouver, mais aussi pour attirer des immigrants francophones.
Dans leur article titré L’Acadie du Nouveau-Brunswick et les immigrants francophones. Un modèle d’intégration économique par les marges, paru en 2021, Leyla Sall et Benoit Bolland ont démontré que, depuis le début des années 2000, l’Acadie du Nouveau-Brunswick est devenue un milieu idéal pour des immigrants d’expression française en raison du discours d’une partie de ses élites et de ses organismes communautaires. Dès lors, le nombre de francophones dans ce milieu augmente considérablement.
Pour réaliser leur travail, Sall et Bolland ont mené des entrevues auprès de 78 immigrants francophones en provenance de la France, de la Belgique, du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne. Selon eux, dans la province du Nouveau-Brunswick, en particulier à Moncton, l’offre de travail y est largement supérieure à la demande. Cette niche attire donc aussi bien les résidents que les immigrants et les étudiants finissants francophones.
En général au Canada, Québec excepté, il y a une certaine exiguïté du marché du travail en français. Cependant, nombreux sont des travailleurs qualifiés ou résidents venant de l’international qui trouvent de belles offres. Par exemple, parmi les centaines d’entreprises qui font la pêche, l’achat et même la transformation des homards en Nouvelle-Écosse, il y a des milliers de travailleurs, parmi lesquels beaucoup d’immigrants.
Grâce à ses dizaines de kilomètres de côtes qu’il y a en Acadie et la qualité de ses fruits de mer et poissons, nombre d’investisseurs s’adonnent à la pêche et l’aquaculture. D’ailleurs, en mai 2018, Cooke Aquaculture à lui seul comptait plus de 1 300 employés seulement au Nouveau-Brunswick, selon un communiqué du gouvernement.
Le monde universitaire représente aussi un espace très accueillant pour les travailleurs étrangers francophones. Les deux seules universités francophones de l’Acadie, à savoir l’Université de Moncton et l’Université Sainte-Anne, ouvrent la porte à beaucoup d’immigrants. Ces derniers atteignent même les postes les plus nobles dans les universités. Le Collège communautaire du Nouveau-Brunswick accueille aussi beaucoup de francophones.
En somme, ce qui joue en faveur des francophones arrivant en Acadie, c’est l’emplacement d’un ensemble d’organismes qui s’adonnent dans les affaires des francophones et des Acadiens. Nous pouvons citer, entre autres, la Fédération des communautés francophones et acadiennes (FCFA), la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) et la Société nationale de l’Acadie (SNA), pour ne citer que ceux-là.