Cette église au cœur du village est l’une des plus belles que j’ai jamais vues. La simplicité des couleurs qui décorent les murs et les statues religieuses de plus que la « finesse de ses boiseries », comme le dirait Rosie Aucoin-Grace, nous donnent l’impression de contempler une œuvre d’art confectionnée avec beaucoup d’attention et d’amour.
Il ne me surprend pas alors qu’autant de gens ont fait un don dans le but de préserver cette partie du patrimoine acadien qui leur tient à cœur. Le besoin de conserver l’histoire locale se ressent un peu partout à Chéticamp, du centre culturel Les Trois Pignons à la boutique Proud to be Lola’s Hookers. C’est justement Lisette Bourgeois, directrice générale de la Société Saint-Pierre qui vient de célébrer ses 75 ans au service de la communauté de Chéticamp, qui a partagé avec moi un brin d’histoire locale.

510 couleurs de Élizabeth LeFort, réalisé 1964. Il a fallu 11 mois pour terminer le tapis hooké.
Dès notre première rencontre, j’ai constaté que Mme Bourgeois avait sa communauté et la francophonie à cœur. J’en ai appris de plus belle sur les objets précieux du village en consultant la fameuse collection de Marguerite Gallant, personnage hors pair originaire de Terre-Noir ayant eu une influence énorme sur les gens de la région, au point d’inspirer le nom du magasin Marguerite boutique et provisions (si ce n’est pas une coïncidence) où j’ai trouvé une copie du livre qui relate les péripéties de la vie à Mme Gallant.
Mme Bourgeois m’a aussi montré la merveilleuse collection de tapis hookés d’Élizabeth LeFort qui ressemble à des toiles d’un musée des beaux-arts. Ce qui m’a épaté le plus est le nombre d’heures consacrées à hooker chacun des tapis qui, pour la plupart des mortels, aurait pris une vie à terminer. À l’intérieur de la même galerie, la directrice générale m’a aussi fait découvrir le tapis original du court métrage bien célébré de Phil Comeau, Le tapis de Grand Pré.
C’est grâce à cette visite que j’ai découvert ce film ainsi que le long métrage La Cabane. N’étant pas Acadien, la première chose qui m’est venu en tête en visionnant cette oeuvre cinématographique, c’était l’intention derrière sa réalisation de faire connaître l’histoire des Acadiens de son coin de pays aux prochaines générations et aux gens en dehors de l’Acadie, comme moi, qui souhaite mieux comprendre cette partie de l’humanité ainsi que de donner une visibilité aux Acadiens qui veulent se voir à l’écran.
En m’asseyant pour écrire mon éditorial, je me suis posé la question : quel est le fil rouge du journal de cette semaine ? Ce qui est ressorti tout de suite, ce sont des gens qui suivent leur cœur et qui font ce qui leur semble juste.
Que ce soit Peach on a Beach, alias Larry Peach, qui vient de réaliser son rêve de longue date de réaliser son premier simple, « Beeping and Bleeping », ou Yvette d’Entremont, qui est dans le processus de terminer le tournage de Raconte-moi un souvenir pour documenter les anecdotes ludiques des aînés de son bercail, je vois des individus qui s’amusent à faire ce qui leur tient à cœur.
Je salue tous les gens de la Louisiane au Cap-Breton qui travaillent d’arrache-pied pour créer un monde meilleur rempli d’activités et de célébrations soulignant les valeurs et les traditions qui ont beaucoup d’importance. On parle entre autres de la nouvelle génération de Louisianais qui apprennent à parler français pour pérenniser les traditions langagières cadiennes, des employés et bénévoles de Radio CIFA qui s’implique pour valoriser la langue acadienne et les membres de l’Association Pump Track and Skatepark Chéticamp qui veulent simplement créer une communauté plus active et vibrante pour leurs enfants.
La vie est courte et personne ne sait vraiment pourquoi on nous a accordé la chance de vivre sur terre. Alors, avec le temps limité qui nous est accordé, il faut prendre le temps de faire ce qui nous fait vibrer.
Jean-Philippe Giroux
Rédacteur en chef