Lors d’une réunion du comité plénier le jeudi 18 août pour la Ville de Yarmouth, M. Smith a présenté au nom d’un petit comité qui milite pour l’érection d’un monument en l’honneur du 2e Bataillon de construction, la plus grande unité militaire ségréguée noire de l’histoire du Canada.
Sa demande était double pour la ville dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse : il a demandé de recevoir une lettre d’appui et que le conseil considère de financer une partie du projet en cours de route.
À la suite de la présentation, une motion visant à rédiger une lettre d’appui au projet et à considérer un financement ultérieurement a été adoptée à l’unanimité par le conseil municipal.
En plus de sa passion pour l’histoire militaire, M. Smith a un attachement personnel au bataillon, vu que son grand-père a servi dans l’unité.
L’histoire du 2e Bataillon de construction a été remise en lumière par feu sénateur Calvin W. Ruck, qui a publié Canada’s Black Battalion : No. 2 Construction 1916-1920 en 1986.
Selon une note de l’auteur, le grand-père de monsieur Smith, révérend Charles Nathan M. Smith, a été interviewé pour le livre en 1971 avant de décéder en 1973. Le révérend Smith avait occupé les rangs de sergent et de sergent-major régimentaire intérimaire.
S’adressant au sénateur Ruck sur les raisons de la formation d’une unité ségréguée, le révérend Smith avait déclaré que « le 2e Bataillon a été formé en raison de la discrimination et des préjugés. La politique de l’armée, officielle ou non, était de ne pas accepter de volontaires noirs dans les unités régulières. »
Historique
Au cours des premières années de la Première Guerre mondiale, plusieurs volontaires noirs se voyaient refuser l’admission aux forces canadiennes. Souvent, ils se faisaient dire qu’il s’agissait d’une guerre d’hommes blancs.
Bien que certains officiers étaient prêts à admettre ces hommes, certains dans les unités refusaient de combattre côte à côte avec des hommes noirs. Même les ordres prescrivant qu’il n’ait pas de discrimination sur une base raciale se faisaient régulièrement ignorer par les recruteurs.
En juillet 1916, un bataillon ségrégué qui deviendra le 2e Bataillon de construction a été premièrement établi à Pictou, en Nouvelle-Écosse. Plus tard dans la même année, il a été déménagé à Truro dans la même province.
L’unité se formait sous le commandement du lieutenant-colonel Daniel H. Sutherland. Ce dernier, comme tous les autres officiers du bataillon, sauf un, était blanc.
L’aumônier du bataillon et ministre baptiste noir de Truro, capitaine William Andrew White, comptait le seul officier noir de l’unité et aurait été le seul officier de commission noir des forces britanniques pendant la Première Guerre mondiale. On peut le comparer aux États-Unis, qui en comptaient six cents.
Le bataillon avait également été autorisé à recruter dans toutes les provinces, ce qui, selon le sénateur Ruck, était une reconnaissance du fait que le bataillon ne concurrençait pas d’autres efforts de recrutement, étant donné que les volontaires noirs furent largement refusés.
Des hommes et des garçons à travers le Canada, certaines colonies britanniques et États-Unis d’Amérique composèrent l’unité. Toutefois, la Nouvelle-Écosse a été le lieu d’origine le plus populaire.
En décembre 1916, le colonel Sutherland a reçu un message d’Ottawa lui indiquant qu’il fallait de toute urgence envoyer un bataillon outre-mer. Il répond que le bataillon était encore en train de recruter, mais qu’il pourrait être prêt à partir la dernière semaine de février.
Avec 19 officiers et 605 hommes et garçons d’autres grades, l’unité était bien loin de l’effectif autorisé de 1 049 officiers et soldats. Ils se sont embarqués pour l’Angleterre en mars 1917, mais comme ils étaient en sous-effectif, le bataillon a été restructuré par le ministère de la Guerre en une compagnie de travail de 500 hommes et le reste a été ajouté aux forces de renfort.
La compagnie est rattachée au Corps forestier canadien et la majorité sert à La Joux dans les montagnes du Jura, tandis que de plus petits détachements sont envoyés à Péronne et Alençon.
Quoique la majorité des soldats n’aient pas directement vu le combat, le révérend Smith est cité dans le livre de Ruck pour avoir déclaré que le bataillon avait subi des bombardements en France par des avions allemands.
Un nombre limité était finalement affecté à des unités de ligne et participa aux combats de tranchées. Avec la signature de l’armistice du 11 novembre 1918, l’unité retourne au Canada tôt en 1919. Il fut officiellement dissout le 15 septembre 1920.
Le groupe trouve des partenariats
M. Smith indique que son comité postule pour recevoir du financement auprès du Programme de partenariat pour la commémoration de Anciens Combattants Canada.
Ce programme couvre jusqu’à 50 % du financement du monument. Il estime que la totalité du projet coûtera entre 30 000 et 35 000 dollars.
Le comité peut trouver plusieurs partenaires dans la communauté, selon M. Smith. Il travaille avec la légion locale pour identifier un lieu, recueillir des lettres de soutien, et potentiellement recevoir le financement nécessaire.
Le lieu proposé est le parc commémoratif aux combattants de guerre, situé en face de l’hôtel de ville et devant la bibliothèque locale.
La Greenfield Community Hall Association s’efforce de parrainer ce projet, selon M. Smith, qui fait partie du conseil d’administration.
Greenville, dans le comté de Yarmouth, était à l’origine une communauté loyaliste noire. M. Smith pense qu’il est approprié d’avoir des partenaires communautaires qui représentent la communauté concernée. De plus, il dit que l’entreprise locale Quality Concrete est prête à donner le béton.
L’Office des affaires afro-néo-écossaises, faisant partie du ministère des Communautés, de la Culture, du Tourisme et du Patrimoine de la Nouvelle-Écosse, a également été approché pour des lettres de soutien et un financement potentiel. Néanmoins, le comité continue de chercher des partenaires pour le projet.
M. Smith a indiqué qu’il avait envisagé d’ajouter Roy Fells au nombre des 16. Bien qu’il n’ait pas fait partie du bataillon en question, il a participé à la Première Guerre mondiale et à la Seconde Guerre mondiale et est considéré par monsieur Smith comme un héros de guerre dans la région.

Percy James Richards
Excuses du gouvernement fédéral
Lors d’un entretien avec Radio CIFA, M. Smith a reconnu que les excuses présentées par le premier ministre Justin Trudeau avaient été un facteur de motivation supplémentaire pour faire avancer ce projet de monument.
Lors de sa présentation au conseil municipal, il a exprimé ceci : « Je pense qu’un monument serait approprié pour cette ville. J’ai assisté aux excuses ; le gouvernement a présenté des excuses le [9] juillet à Truro, et il y avait 2500 personnes présentes. C’était vraiment un moment émouvant pour les personnes présentes, surtout celles de la communauté noire. Et [Trudeau], il a très bien parlé… extrêmement bien. »
« Le champ [où l’événement a eu lieu] est celui où le bataillon s’est formé il y a 106 ans. C’était incroyable pour moi de me tenir là et de penser que mon grand-père était là, dans cette unité, il y a 106 ans, dans ce champ. Donc, c’était très, très émouvant et un très bon moment. »
À Truro, devant une foule enthousiaste et des salves d’applaudissements, M. Trudeau offrit au nom de gouvernement les excuses suivantes : « Je suis ici aujourd’hui afin de présenter les excuses du gouvernement du Canada pour la façon horrible dont ses patriotes ont été traités. … Pour le racisme, du fait qu’on a refusé des volontaires noirs alors qui ont offert de sacrifier leurs vies pour tous, nous offrons nos excuses. »
Également présent pour entendre les excuses était Peter Richards de Hilltown, dans la municipalité du district de Clare, dont son grand-père Percy James Richards servi dans le 2e Bataillon de construction.
Percy Richards était originaire de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, mais sa femme était originaire de la région de Hilltown et s’y est établie pendant un certain temps après la guerre avant de retourner à Saint-Jean.
M. Richards a qualifié les excuses comme puissantes et signifiantes. Il mentionne qu’elles contribuent à faire reconnaître la dignité et les sacrifices des combattants. « [Cela signifiait] beaucoup pour la reconnaissance de pouvoir parler du bataillon et présenter des excuses en raison du racisme. Je dois dire que le discours [de M. Trudeau] a beaucoup parlé du racisme et de la façon dont ce bataillon a été traité dans le service. »
Il raconte également qu’il a apporté une photo de son grand-père à la cérémonie et qu’il l’a soulevée de temps à autre pour rappeler aux présentateurs à qui ils présentaient symboliquement leurs excuses.
« Nous étions assis devant l’estrade où les orateurs allaient parler, Trudeau, etc., et j’ai gardé cette photo en avant, raconte-t-il. À certains moments, lorsqu’ils ont dit certaines choses en présentant les excuses, j’ai soulevé cette photo, et je me suis assuré qu’ils pouvaient voir la photo, et ils ont vu la photo. »