
Professeur et doyen associé à la recherche au Département des sciences végétales, alimentaires et environnementales de l’Université Dalhousie à Halifax, Chris Cutler indique que la survie des colonies d’abeilles à miel en Nouvelle-Écosse a été plutôt bonne cet hiver.
Parmi les signes encourageants, l’expert souligne la formation d’essaims, une façon naturelle pour les abeilles à miel de diviser une ruche trop volumineuse, et l’ajout par les apiculteurs de hausses, des boîtes qui agrandissent la ruche lorsque les récoltes sont abondantes.
À l’autre bout du pays, l’apiculteur en chef de la Colombie-Britannique, Paul van Westendorp, décrit de son côté un hiver « assez rude » ayant causé une perte importante de colonies d’abeilles mellifères dans sa province par rapport aux années passées.
Il explique qu’une multitude de facteurs entrent en jeu lorsqu’il est question de la survie de colonies, dont la température qui ne doit être ni trop froide ni trop humide, la vitalité de la colonie en début d’hiver et l’absence de maladies.
Des défis de taille
En 2020, la Nouvelle-Écosse comptait environ 700 apiculteurs, comparativement à 4 000 apiculteurs en Colombie-Britannique.
Paul van Westendorp rappelle toutefois que 3 800 d’entre ces derniers sont des amateurs exploitant moins de 10 colonies. Seuls quelques centaines d’entre eux exploitent plus de 25 à 50 colonies.
Chris Cutler et Paul van Westendorp s’entendent : l’augmentation du nombre d’apiculteurs amateurs insuffisamment éduqués et insouciants contribue directement à la propagation de virus chez les abeilles, en particulier via le parasite apicole Varroa destructor.

Les virus se propagent ensuite de rucher en rucher et détruisent les colonies : « La complexité de l’acarien varroa réside non seulement dans le fait qu’il s’agit d’un parasite extrêmement virulent qui dévaste les abeilles à miel par sa propre action parasitaire, mais aussi dans le fait qu’il est un vecteur important pour une énorme variété de virus dans l’organisme de nombreuses abeilles avant même qu’elles n’entrent dans la saison hivernale », explique Paul van Westendorp.
La destruction de l’habitat naturel des abeilles, causée en grande partie par l’agriculture intensive, est également une menace de taille causant directement la raréfaction de leurs sources de nourriture : « Le principal facteur de déclin de toute population animale ou sauvage est la perturbation de l’habitat, qui constitue le principal défi pour la plupart des animaux, y compris les abeilles », identifie Chris Cutler.
« Bien sûr, il existe une multitude d’autres défis dans l’agriculture qui peuvent également être un problème pour les abeilles, notamment les pesticides », ajoute l’expert. Il tempère cependant en affirmant que les agriculteurs veillent de plus en plus à la protection des abeilles.
Planter des fleurs pour aider les abeilles
Paul van Westendorp et Chris Cutler unissent leur voix pour encourager la floraison à tout prix. D’après eux, c’est par là que passera la sauvegarde des abeilles.
« Sur ma pelouse, j’ai beaucoup de pissenlits et il y a des sections que je ne tonds pas du tout pour encourager les fleurs sauvages à pousser. Certaines personnes les appellent de mauvaises herbes, moi je les appelle des fleurs qui fournissent aux abeilles une bonne source de sucre sous forme de nectar et une source de protéines sous forme de pollen!» dénote Chris Cutler.
Il souligne également l’importance pour les abeilles sauvages de se trouver un endroit pour vivre, la plupart des abeilles vivant dans le sol : « Par conséquent, moins vous perturbez votre propriété, particulièrement dans les zones dénudées de sol sablo-limoneux, plus vous apercevrez de petits trous au sol, surtout orientés vers le sud, où des abeilles sont nichées. D’autres abeilles font leur nid dans des brindilles », ajoute-t-il.
Paul van Westendorp encourage pour sa part le public à cultiver leur vision romantique des abeilles et de l’apiculture, tout en recommandant aux apiculteurs amateurs de se former afin de pouvoir assurer une saine gestion de leurs colonies.
Il insiste également sur l’importance de la floraison sauvage et domestique pour les abeilles, ce qui leur permettra de polliniser plus du trois quarts des végétaux sur Terre et, finalement, de contribuer à la sauvegarde de l’humanité.